mercredi 10 octobre 2007

La nation civique québécoise et le « nous » de Bernard Landry

L’article de monsieur Bernard Landry portant sur « Le véritable « nous » » (cf. RÉF.) ne nous convient ni ne nous convainc guère. Sans s’en rendre compte, il fait de la nation civique une question ethnique ! Cette nation civique étant québécoise fait des exceptions : les Amérindiens et les Inuits. Tandis que « tous les autres citoyens du Québec font partie de notre nation » parce qu’« ils n’ont pas, comme tels, de droits particuliers ». Il y a toutefois une autre exception : les Anglo-Québécois. Or, cette « minorité historique anglophone […], selon les termes de monsieur Landry, jouit d'un « statut linguistique différent ». Il soutient même que « les deux tiers sont bilingues ».

Il est difficile de comprendre comment le « nous » formel de la nation civique québécoise aurait des « contours juridiques faciles à définir », mais ce ne serait « pas suffisant pour désigner le périmètre de quelque nation que ce soit ».

Partant de l’idée qu’ « une nation n’est pas que civique », il est conduit à la définir en termes sociologiques, surtout culturels. De là, il expose sa théorie du non-multiculturel et du multiethnique évidemment. Finalement, ses considérations se perdent dans « le métissage avec des Amérindiens…. La conquête britannique nous amena des Anglais, des Écossais, des Irlandais… L’époque contemporaine nous a donné des gens d’Europe de l’Ouest et de l’Est […] [des] survivants de la Shoah… […] des compatriotes dont les racines sont aux Caraïbes, en Afrique, en Asie et en Amérique latine ». La question n’est finalement que sociale. Il s’agit de savoir comment se passe l’intégration. Puis le « nous » fait partie du tout ! Vu sous cet angle, il nous reste quoi ?

– Le Québec n’est pas bilingue ! Le Québec est francophone ! Cependant « à Montréal, la moitié des immigrants travaillent en anglais » ! Dans le monde scolaire : « Quarante pour cent de ceux qui ont fréquenté les écoles primaires et secondaires francophones vont au collège en anglais. » Pourtant, la langue officielle au Québec est le français.

Ce pénible raisonnement emberlificoté de nombreux concepts imprécis et parfois creux nous conduit laborieusement à « une belle forêt » où il ne faut surtout pas « jeter nos souches dans le feu de la Saint-Jean ».

Si monsieur Landry avait une idée plus complète de la nation au sens intégral, il aurait su que la nation au sens sociologique ne le conduira jamais à la souveraineté politique complète du Québec. Il fait du souverainisme culturel sur la base d’une certaine notion de la nation au sens général qui est un groupe humain – les Québécois-Français – qui est arrivé à se reconnaître distinct. En ce sens, il ne conçoit qu’un aspect de la nation qu’il limite au culturel surtout. Or, l’agir par soi de la nation au sens intégral doit être possible dans les trois grands domaines de la société civile : 1. le politique, 2. l’économique et 3. le culturel, – et tout cela tant à l’interne qu’à l’externe.

La nation au sens intégral vise la maîtrise suffisante dans tous les domaines, sans exception. L’abondance culturelle du Québec-Français ne fera jamais de la nation québécoise une nation indépendante tant et aussi longtemps que l’état et la société québécoise ou la population québécoise-française ne prendront pas complètement en mains la vie politique, la vie économique et la vie culturelle. Seule la maîtrise et la défense de ces trois VIES pourra faire du Québec une nation indépendante. En dehors de ce credo, c’est toujours une forme quelconque d’annexion dans le fédéralisme avec toutes ses conséquences de limitations de VIE collective INDÉPENDANTE. Le seul VRAI combat, il est là.

En complément : Bruno Deshaies, Commentaire. – Nation, nationalisme et indépendance.
– Annexion et science historique. Référence :
http://www.vigile.net/De-l-affirmation-a-l-independance

Opinion

Le véritable «nous»
Bernard Landry, Ancien premier ministre du Québec
Le Devoir, Édition du mercredi 03 octobre 2007


L'usage du mot «nous» pour désigner les membres de la nation civique québécoise est incontournable: il englobe toutes les personnes de citoyenneté canadienne -- et j'espère bientôt québécoise -- qui habitent notre territoire. Seuls, quelque 75 000 citoyens ont une autre appartenance. Ce sont les Amérindiens et les Inuits qui habitent des portions désignées de notre sol que nous gérons de concert avec eux. Ils ont leurs propres nations, plus vieilles que la nôtre et formellement reconnues par notre Assemblée nationale depuis 1985.


Beaucoup plus que civique

Sous peine de dérives inacceptables, tous les autres citoyens du Québec font partie de notre nation, sont régis par les mêmes lois et ont les mêmes droits. La minorité historique anglophone, environ 10 % de la population, dont les deux tiers sont bilingues, jouit d'un statut linguistique différent. Quant aux Québécois issus de l'immigration, ils n'ont pas, comme tels, de droits particuliers puisque, en accédant à notre espace civique, ils acquièrent les mêmes que tout le monde. Beaucoup plus que civique Il est évident que ce «nous» formel aux contours juridiques faciles à définir n'est pas suffisant pour désigner le périmètre de quelque nation que ce soit. Une nation n'est pas que civique. C'est un groupe humain constitué au fil des ans et qui se définit par une foule d'autres facteurs plus complexes, comme la culture, la langue, l'histoire, la solidarité socio-économique, les rêves et les projets communs. Ce sont toutes ces autres dimensions du «nous» que les nouveaux arrivants, avec notre aide fraternelle et vigilante, ont le devoir d'assumer selon des rythmes divers et des degrés variables.

Multiculturel, non

Toutes les mutations qu'on attend d'eux, dont la connaissance de la langue est la plus urgente, ne peuvent pas être réalisées à court terme, mais leur nécessité doit être connue et acceptée des migrants avant même qu'ils n'arrivent ici. Une telle intégration est évidemment incompatible avec le multiculturalisme qui tend à l'entraver. Le Canada est le seul pays au monde à avoir commis l'imprudence d'inclure un tel concept dans sa constitution que le Québec n'a d'ailleurs jamais acceptée. Peu de gens d'ici s'acharnent encore à défendre une thèse aussi «perverse et néfaste», selon l'expression de Jean-Claude Corbeil, et tout autant réprouvée par le juriste Julius Grey que par Neil Bissoondath qui la décrit comme «la plus grande barrière à l'intégration parce qu'elle crée des ghettos et impose des stéréotypes».

Le métissage avec des Amérindiens en fut un des premiers jalons. La conquête britannique nous amena des Anglais, des Écossais, des Irlandais. Puis, surtout après la Seconde Guerre mondiale, des gens d'Europe de l'Ouest et de l'Est ont rejoint notre espace national. Un grand nombre de survivants de la Shoah sont venus s'établir ici malgré le «none is too many» de Mackenzie King.

L'époque contemporaine nous a donné des compatriotes dont les racines sont aux Caraïbes, en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Les cas d'intégration parfaite et exemplaire ne se comptent plus. Mais toutes ces heureuse additions ne doivent en rien atténuer l'importance déterminante des souches initiales et de leur parcours historique. Le contraire, en plus d'être une négation du réel, serait d'une odieuse ingratitude.

Bilingue, non

Pas plus que multiculturel, le Québec n'est bilingue. Il est francophone et, depuis Robert Bourassa le français est formellement sa langue officielle après avoir été, dans les faits et depuis toujours, sa langue nationale commune. Prétendre le contraire ne pourrait que faire du nouvel arrivant une victime, en lui faisant croire qu'il peut, sans conséquence, choisir une autre langue d'usage que celle de son nouveau pays. La réalité, quoique très améliorée par la loi 101, demeure préoccupante: à Montréal, la moitié des immigrants travaillent en anglais, et une majorité d'allophones en font leur langue d'usage. Quarante pour cent de ceux qui ont fréquenté les écoles primaires et secondaires francophones vont au collège en anglais. Ce n'est bon ni pour eux ni pour l'ensemble de la nation. Il faut trouver des moyens de corriger ces inquiétantes anomalies.

Et ailleurs...

Tous les pays d'immigration s'imposent le devoir d'intégrer les nouveaux arrivants et ne cherchent pas à les leurrer, comme le Canada, par un multiculturalisme constitutionnalisé. La France et les États-Unis, entre autres, pratiquent une plus grande vigilance que nous en exigeant des nouveaux arrivants des compétences linguistiques et civiques préalables à l'accès à la citoyenneté. Comment bien exercer, notamment, le droit et le devoir fondamental de voter si on ne sait rien des institutions et qu'on ne peut suivre les débats médiatiques qui jouent un rôle si fondamental dans nos démocraties?

Tout assumer

À terme nos nouveaux compatriotes sont donc conviés à tout assumer. Suivant leur niveau culturel et d'éducation, ils sont invités à connaître aussi bien Champlain et Frontenac que Jeanne-Mance et Marguerite d'Youville. Ils doivent chercher à intégrer peu à peu à leur nouveau bagage historique aussi bien les Patriotes que Jean Lesage et René Lévesque. Ils doivent tenter d'inclure Félix Leclerc, Gaston Miron, Maurice Richard et les autres dans leur québécitude en construction. On sait évidemment qu'ils n'oublieront jamais complètement leur terre d'origine, et c'est tant mieux car ces diverses réminiscences nous enrichissent tous.

Une belle forêt

Les devoirs et les défis de l'intégration sont donc aussi essentiels qu'exaltants, et ils constituent une condition préalable à une vie nationale harmonieuse. Il ne saurait être question de «jeter nos souches dans le feu de la Saint-Jean», comme l'a dit en 1999 Gérard Bouchard, qui devra maintenant proposer quelque chose de plus conforme à notre destin à l'issue de la commission qu'il préside avec Charles Taylor, lui-même descendant de Madeleine de Verchères!

Tous deux devraient plutôt présenter nos souches comme le terreau initial d'une belle forêt laurentienne, majoritairement peuplée de ses espèces vernaculaires, mais toujours désireuse de les enrichir d'essences exotiques à condition qu'elles s'y acclimatent comme le veut la sagesse de la nature elle-même.

Bernard Landry, « Le véritable « nous ». Le Devoir, mercredi 3 octobre 2007 (« Opinion »).
Source :
http://www.ledevoir.com/2007/10/03/159180.html ou http://www.vigile.net/Le-veritable-nous

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Décidément, Jean-Bernard Landry, Ancien premier ministre du Québec, l'ancien Duc de cette "province" sous occupation anglaise, trouve bien difficile d'abandonner le concept réducteur de "nation civique", appliqué à son "ancien" peuple, qui permettait de le rassembler en un seul et compacte groupe bien uniforme pour sa commode et pratique gestion.

Dans un élan désespéré de refus d'en souffrir plus longuement, le Marquis souleva sa plume pour nous rapeller qui au juste est Le véritable "nous"

"L'usage du mot «nous» pour désigner les membres de la nation civique québécoise est incontournable: il englobe toutes les personnes de citoyenneté canadienne -- et j'espère bientôt québécoise -- qui habitent notre territoire."(Jean-Bernard Landry)

Bernard Landry, par cette affirmation, légitimise l'identité "Canadian" anglaise et renie l'identité Canadienne, originelle, des Québécois. Pour lui, l'identité ne se résume qu'à la citoyenneté civique et donc à une simple adresse postale. Il suffit d'habiter le territoire.

Seuls, quelque 75 000 citoyens ont une autre appartenance. Ce sont les Amérindiens et les Inuits qui habitent des portions désignées de notre sol que nous gérons de concert avec eux. Ils ont leurs propres nations, plus vieilles que la nôtre et formellement reconnues par notre Assemblée nationale depuis 1985.

Bien que M. Landry vient d'affirmer que d'habiter notre territoire fait de celui-là un "NOUS", il distingue parmis ces "NOUS" une portion qui à cause de leur ancienneté auraient droit à d'avantage de considérations entre "TOUS". Ceci est bien légitime, mais de qui au juste parle-t-il lorsqu'il dit "plus vielles que la NÖTRE" et "NOTRE Assemblée Nationale" ? Qui sont ces "Nôtre" et "Notre" ? Les Québécois? Ou les Anglais?

Or, NOUS, Québécois, sommes ici, d'au moins 250 ans, avant l'Anglais, habitants du territoire. N'avons-nous pas donc aussi droit à plus d'avantage pour notre ancienneté ?
C'est quand-même étrange cette reconnaissance de Landry envers l'ancienneté des autres ethnies mais pas de la nôtre !

C'est quoi son problème au Marquis de Landry avec notre identité comme peuple autochtone ?

Selon Landry, la minorité Anglaise qui a agressé ces peuples qui habitaient ce territoire paisiblement, aurait droit à une reconnaissance de celui-ci !

Comme si le peuple Québécois en avait pas assez du mépris de l'Anglais !