jeudi 13 septembre 2007

Le Premier Canada (1/5)

Le Premier Canada (1/5)
Un Canada français constitue un « système un ».

Chronique du jeudi 13 septembre 2007 (Cf. Vigile.net : http://www.vigile.net/Le-Premier-Canada-1-5 )

Le Canada en Nouvelle-France
« Un gouvernement colonial, concedo ;
les chefs sont nommés par la métropole, c’est vrai,
mais on recherche les intérêts d’un seul Canada. »

Nous présenterons au cours des cinq prochaines semaines, la vision de l’historien Maurice Séguin portant sur l’histoire des deux Canadas, dont le premier Canada fut cette société coloniale française en Nouvelle-France, comme colonie de la France. La « synthèse générale de l’évolution politique et économique des deux Canadas » est divisée en deux parties : la première, « Avant 1760 : Un Canada » et, la deuxième, « Après 1760 : Deux Canadas ». Cette distinction est fondamentale pour tous ceux et celles qui souhaitent comprendre l’histoire actuelle du Québec.

En une dizaine de pages, Maurice Séguin dresse le bilan de l’histoire du Canada avant 1760 en insistant principalement sur les traits principaux de cette colonisation française plutôt que sur le récit chronologique des événements de la vie quotidienne en Nouvelle-France. Il étudie systématiquement l’affrontement entre deux colonisations qui a conduit à la Conquête de 1760, puis à la naissance du Canada-Anglais, c'est-à-dire du « deuxième Canada ». Ce Fait considérable a marqué définitivement la fin du régime français pour les Canadiens. Comme l’a écrit l’historien Guy Frégault, collègue de monsieur Séguin au Département d’histoire de l’Université de Montréal, dans La société canadienne sous le Régime français : « En 1763, il reste des Canadiens, il ne reste plus de Canada. » (Brochure No 3 de la Société historique du Canada, 1954.)

Mais en 1608, comme l’écrit Maurice Séguin : « La France projette une nouvelle province, une colonie apte à devenir une nation. » Pour ce faire, il observe la nature et la situation de cette colonie et de la colonisation française en Amérique du Nord. Il constate d’abord la naissance d’une colonie « intégrale ». Il indique d’entrée de jeu que « Tout est là. » avant 1760. Il s’agit bien d’UN seul Canada – français – s’il est besoin d’ajouter. Le Fait marquant consiste en cette idée fondamentale qu’il existe « une autorité coloniale qui défend contre l’Angleterre la vie du Canada français ». Autrement dit, une colonie française prend naissance au Canada sous l’égide de la Métropole française. Ainsi est lancée l’aventure de la colonisation française en Amérique du Nord.

Bruno Deshaies


HIST 585 Introduction à l’histoire du Canada

Maurice Séguin

SYNTHÈSE GÉNÉRALE
de l’évolution politique et économique
des deux Canadas


Nos efforts vont porter sur les grandes courbes : c’est une histoire légitime. Les détails sont nécessaires pour satisfaire l’esprit, mais nous manquons trop souvent de l’esprit de synthèse…

SOMMAIRE

AVANT 1760 : UN CANADA

A.- Étude générale de ce seul Canada

I – Colonie de même nature que les autres à la même époque
II – Une colonie de style différent
III – Une colonie de différente intensité

B.- Dans un contexte d’intense conflit international

I – Irréductible conflit d’intérêts
1. En Europe
2. En Amérique

II – Forces supérieures du monde anglais
1. En Europe
2. En Amérique

III – Probabilités – retrait ou abandon total

IV – Premier choc entre les 2 mondes
– Causes
– Résultats
– Abandon total

V – Deuxième choc
– Causes
– Résultats
– Abandon total
C.- 1760 Résultats

I – Résultats mondiaux
1. Triomphe de l’« Anglo-Saxondom »
2. La plus grosse défaite du monde français

II – Résultats européens
1. Hégémonie de l’Angleterre
2. Fin de la courte hégémonie française

III – Résultats américains
1. Pour l’Amérique anglaise
2. Pour l’Amérique française (surtout le Canada)
– Atteint en tant que colonie intégrale organisée
– Inévitable formation d’un Canada-Anglais, accident, séparatisme
– Le schisme anglais fait rebondir mais ne modifie pas essentiellement
– Pièges psychologiques :
- Majeurs : 1) La « simplicité incompréhensible », le changement d’empire.
2) Fédéralisme – épanouissement
- Mineurs :

Synthèse générale

Nos efforts vont porter sur de grandes courbes ; c’est une histoire légitime. Les détails sont nécessaires pour satisfaire l’esprit, mais nous manquons trop souvent de l’esprit de synthèse…

AVANT 1760 : UN CANADA

Tout est là. Donc pas question d’infériorité économique ou culturelle à l’intérieur.
Il pouvait bien y avoir :
- infériorité de voisinage (quelle nation en est exempte) ;
- sentiment de tutelle par la mère-patrie (situation de l’enfant à l’endroit de ses parents).

A.- Étude générale de ce seul Canada

I – Une colonie de même nature que les autres à la même époque

Colonie de même nature que celles qui existaient à la même époque : la colonisation du Canada (la vallée du Saint-Laurent) représente un phénomène de même nature que la colonisation des autres colonies (comme les colonies d’Angleterre, d’Espagne ou du Portugal).

1- similitude :
(en comparaison avec la colonisation anglaise)

a) de cause : deux métropoles de même nature, deux nations d’Europe parvenues à peu près au même degré de civilisation, deux organismes sociaux, deux organismes économiques, deux cultures… semblables.

b) d’intention : les deux métropoles poursuivent le même but, qu’il soit visé spontanément ou lucidement. Ce qu’elles recherchent : établir des populations, des provinces d’outre-mer (pas question de fonder des nations qui seront un jour indépendante).

c) de peuplement :

2- caractères généraux similaires :

La France projette une nouvelle province, une colonie apte à devenir une nation.

Le Canada est devenu :

a) une colonie « organique » :

Il ne s’agit pas ici d’envoi d’individus, de colons français qui vont entrer dans un autre organisme. C’est l’organisation d’une société civile, d’un organisme politique qui doit encadrer une collectivité par l’organisation de cadres politiques, économiques, culturels ; c’est aussi l’organisation d’une société religieuse. Ce ne sont donc pas des immigrants…

b) une colonie « intégrale » : au civil.

Un organisme doué de toutes ses parties, complet.

Secteur économique : un système complexe canadien bâti par la France ; il a ses racines dans la Métropole et est orienté jusqu’à un [certain] point sur les besoins de la Métropole.

Nécessité du rôle de l’agriculture : c’est logique au début (même chose aux États-Unis). Il faut non seulement nourrir les colons, mais c’est la façon la plus économique de faire travailler les gens… c’est partout d’ailleurs l’époque de l’agriculture.
À la conquête 80 % étaient des ruraux,

Rôle du commerce :

Au début la fourrure, puis le blé et la farine. La colonie ne peut produire tout ce dont elle a besoin… il faut acheter de l’extérieur… il faut un surplus de marchandises pour exporter… Il se crée bien vite une bourgeoisie, une classe d’hommes d’affaires. Les grands commerçants sont les premiers à prendre le nom d’habitants ; ils [constituent] le premier corps organisé… les bourgeois de Québec et de Montréal.

L’État métropolitain va favoriser le développement économique de la colonie ; ses représentants ne travaillent pas toujours 100 % à cela – certains sont corrompus, mais c’est l’intérêt même de la métropole que de travailler au développement économique de la colonie : le développement économique du Canada français. Une armée qui garde et protège ce développement ; il s’appuie sur les capitaux français. Nous étions maître de notre vie économique.

L’État métropolitain organise (Talon) : l’intendant est nommé par la France, mais il travaille au développement de la vie canadienne, 100 % de pouvoir ; il n’a pas à composer, à partager. Toute la taxation employée à la vie canadienne… les rivaux sont à la frontière. Nous sommes maîtres alors, parce que seuls.

Industrie : forges et construction de navires (selon les possibilités et l’époque). Talon [écrit] : « c’est le commerce qui fait l’âme de l’établissement » (c'est-à-dire de la colonie).

Secteur politique : système un.

Un gouvernement colonial, concedo ; les chefs sont nommés par la métropole, c’est vrai, mais on recherche les intérêts d’un seul Canada. Une autorité locale qui défend contre l’Angleterre la vie du Canada français. Les subsides métropolitains ont peut-être été insuffisants, mais il ne faut pas voir seulement le côté négatif, il y a eu du positif.

Secteur culturel : (suite à la prochaine chronique)


RÉFÉRENCES :

Maurice SÉGUIN, « Synthèse générale de l’évolution politique et économique des deux Canadas. » Notes de cours établies probablement par les étudiants qui ont suivi le cours HIST 585 intitulé « Introduction à l’histoire du Canada » en 1961-1962. Description : « Sociologie du national. Les principales explications historiques de l’évolution des deux Canadas. » (Université de Montréal, Département d’histoire.)

W. J. ECCLES, « La société en Nouvelle-France. » Document que nous pouvons trouver sur le site du Séminaire de Sherbrooke, s.d. Consulter : http://www.seminaire-sherbrooke.qc.ca/hist/hist4/Enrichi/societe.htm
Nous conseillons la lecture de cet exposé qui illustre la vie de la colonie française du Canada sous le Régime français. De nombreux mythes s’effondreront à la lecture de cette DESCRIPTION DE LA VIE POLITIQUE, ÉCONOMIQUE, SOCIALE ET CULTURELLE DES CANADIENS AVANT 1760, dans ce PREMIER CANADA. Comme le fait remarquer d’entrée de jeu Maurice Séguin : «TOUT EST LÀ. DONC PAS QUESTION D’INFÉRIORITÉ ÉCONOMIQUE OU CULTURELLE À L’INTÉRIEUR. »

Du même auteur :

Le gouvernement de la Nouvelle-France. Publication de la Société historique du Canada, 1966. Brochure no 18.
Source : http://www.collectioncanada.ca/cha-shc/002013-119.01-f.php?&booklet_id=H-18&page_sequence_nbr=1&browse=yes&&page_id_nbr=4668763&&&PHPSESSID=0lrgceojkt7tqg8mfq7gf3p7j7

XXX. « La société canadienne en Nouvelle-France. » Un tableau des forces et des faiblesses des sociétés coloniales anglaises et françaises en 1745.
Source : http://www.recitus.qc.ca/html/tache_meq/primaire/bloc2_diffusion/Jour%202/4_feuille_cd3_socnf_treize_colonies_1745.pdf

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