vendredi 5 janvier 2007

Nation québécoise

Maurice Séguin se pose la question suivante :

« Une substitution peut-elle être pour le mieux ? »

Il répond :

« Il ne saurait exister [pour une nation] de substitution permanente pour le mieux, tant que survit la collectivité remplacée ou que l’assimilation n'est pas totale. » (Les Normes, Chapitre I, sect. 2.)

Le débat sur la nation québécoise tourne principalement autour de cette question. Les avis des fédéralistes vont dans un sens, ceux des souverainistes dans un autre et finalement tout devient très mêlé. Il semble que chaque groupe a intérêt à rendre le moins clair possible ce qui devrait l'être.

Pour s'y retrouver, voici un aperçu sur quelques sens accordés au terme de «nation » selon Maurice Séguin.

3.2 TENTATIVE DE DÉCRIRE LA NATION

3.2.0 Plusieurs sens accordés au terme « la nation »

Le terme « la nation » peut revêtir plusieurs sens :

3.2.1 La nation au sens le plus général

La nation ou nationalité est un groupe humain qui est arrivé à se reconnaître distinct pour de multiples raisons, très variables, pas toutes nécessaires à la fois.

PAR EXEMPLE :

· une commune origine, selon la croyance acceptée et qui se perd dans le temps ;
· une commune langue,
· des traditions communes, une même histoire,
· l’occupation d’un même territoire,
· un impératif géographique,
· un accident historique,
· un partage dynastique ou
· un découpage impérialiste aux effets durables...
· etc.

3.2.2 La nation au sens étatique, juridique

3.2.2.1 C’est-à-dire : l’État-Nation ou l’ensemble d’individus de même origine ou de diverses origines, encadrés de gré ou de force dans un système juridique, constitutionnel, système doté de la souveraineté politique.

3.2.2.2 Dans ce cas, l’accent est mis sur l’État, sur l’aspect politique.

3.2.2.3 L’État-Nation est un groupe de nations ou une seule nation (sens général), le tout soumis à l’action et aux lois d’un gouvernement souverain.

3.2.3 La nation au sens sociologique, culturel surtout

3.2.3.1 C’est un groupe distinct et différent qui semble s’être formé spontanément. Un milieu avant tout culturel qui imprègne, caractérise l’individu.

On insiste sur l’unité (et la valeur) de la culture distincte et différente de la communauté.

On paraît moins s’intéresser à l’organisation politique. Souvent on admet la nécessité d’une économie nationale mais sans trop s’interroger sur ses rapports avec le politique.

3.2.4 La nation au sens intégral

3.2.4.a) Principes fondamentaux menant à l’idée de nation au sens intégral

3.2.4.a.1) L’agir (par soi) collectif est possible dans tous les aspects.

L’agir (par soi) collectif
est POSSIBLE dans tous les aspects et
PEUT s’étendre à tous les domaines
· à l’intérieur, comme à l’extérieur (cf. NOTE).

[Positivement, cet agir (par soi) collectif signifie :]

En politique :
commander sa propre vie, posséder son autonomie interne et externe, jouir de la pleine autodétermination politique, avoir son « self-government » complet.

En économique :
gérer sa propre vie économique…

Au culturel :
maîtriser sa propre vie culturelle…

[Il est impératif de :]

Ne pas réduire à un seul aspect :
- à l’autodétermination politique,
- à la possession de son économie,
- à la maîtrise de sa culture.


Source : Les Normes, chapitre III. Extraits.


NOTE. - Il faut considérer que l’« agir (par soi) collectif » ne se limite pas uniquement aux domaines intérieurs de la vie politique, économique et culturelle. Il se rapporte aussi et obligatoirement aux domaines extérieurs. La vie complète d’une communauté ne peut se limiter au « Social » ou se contenter du « National » uniquement à l’interne, par exemple, ni se satisfaire de la perspective de la nation au sens sociologique, étatique ou général seulement. Pour comprendre l’étendue des domaines de la vie d’une société, il faut nécessairement considérer deux aspects : le national et le social. Comme l’indique Maurice Séguin dans l’une de ses normes : le national se rapporte « aux relations avec les autres collectivités », tandis que le social concerne surtout « le sort des personnes et la répartition des biens à l’intérieur d’une société » (cf. Les Normes, chapitre IV). La nation au sens intégral englobe ces deux facettes de la nation et encore plus par la volonté d’agir (par soi) collectivement en politique, en économique et au culturel.

Bruno Deshaies
Montréal, 5 janvier 2007

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