samedi 30 décembre 2006

Deux attitudes en face de l’histoire nationale du Canada français

L’Académie de l’indépendance

Document

Le texte qui suit est extrait de L’idée d’indépendance au Québec (cf. RÉF. ci-dessous). Cette première de trois conférences de Maurice Séguin télévisées et diffusées par Radio-Canada les 18 mars, 25 mars et 1er avril 1962 remonte à 44 ans. Il s’agit de l’introduction à l’étude et à l’analyse de l’idée d’indépendance dans l’histoire nationale du Canada français. Malgré le temps écoulé, ces trois paragraphes d’introduction historiographique sont d’une clarté sans équivoque sur le drame du peuple québécois-français. Les derniers débats qui font rage en ce moment nous montrent à quel point la situation n’a pas changé depuis 170 ans.

Les
deux Stephen/Stéphane, Harper et Dion, incarnent la première attitude qui est « la position la plus répandue ». Ils ne changeront JAMAIS d’idées. Jean Charest, Benoît Pelletier et combien d’autres endossent ce point de vue ? Ils sont des millions comme eux au Canada dans son entier. La minorité anglophone du Québec ne joue que son rôle de prolongement du pouvoir canadian en sol québécois. Ce sont les défenseurs fanatiques du régime de l’union fédérale canadian à tout prix.

L’autre attitude considère qu’« être un peuple minoritaire dans une fédération, c’est être un peuple annexé ». Chez les indépendantistes, cette position n’est hélas ! pas toujours très bien comprise. Les souverainistes qui se bombent le torse au sujet de la nation québécoise sont-ils prêts à soutenir ouvertement que « l’indépendance complète est absolument nécessaire » ? Jusqu’à ce jour, ils s’en sont montrés incapables, parlant plutôt d’association, de partenariat et même de reconfédération (sic !). La déclaration récente de Gilles Duceppe à Québec est une coquille vide. Que signifie exactement cette déclaration : « Tout ce qui nous manque, c’est un pays. » Les vrais indépendantistes ne peuvent « se contenter d’une fraction d’indépendance » contrairement aux fédéralistes qui se contentent « d’un partage de pouvoirs dans une union fédérale ». Pour les souverainistes, péquistes ou bloquistes, peuvent-ils se contenter de « ramener [d’Ottawa] tous les pouvoirs, ici, au Québec » ? Est-ce comme dire « ramener le chômage à 5 % » ? Ou bien est-ce vouloir tout ramener à la situation antérieure ? Nous connaissons pourtant cette situation, c’est celle de la SUJÉTION (antonyme : indépendance) !

Dans l’optique indépendantiste, « l’État n’est pas la nation, mais l’État est le principal instrument de l’épanouissement national ». L’indépendance complète « est à rechercher en elle-même comme un bien ». Pour faire passer cette autre attitude dans la pensée politique des Québécois, ses défenseurs ont besoin du nombre et aussi de moyens financiers considérables s’ils veulent persuader la population québécoise que ce CHOIX est un bien en soi – une nécessité de sa libération nationale complète.

Bruno Deshaies


RÉFÉRENCE : Maurice Séguin, L’idée d’indépendance au Québec. Genèse et historique. 2e éd., Trois-Rivières, Les éditions du Boréal Express, 1971, p. 9-10. (Coll. « 17/60 »).

  • TEXTE DE MAURICE SÉGUIN (1962)
Fédéralisme et indépendantisme


Devant le sens à donner à l’histoire du Canada français, les esprits adoptent deux attitudes.

[Première attitude]

La position la plus répandue, celle qui depuis 1840 domine l’interprétation traditionnelle de l’histoire du Canada, se rattache à l’idéologie fédéraliste. Constatant que la nationalité, l’ordre communautaire spontané, ne se confond pas nécessairement avec l’État, cette école conclut qu’une collectivité minoritaire peut accepter un partage de pouvoirs dans une union fédérale, consentir à une certaine centralisation sans perdre pour autant la maîtrise de l’essentiel de sa vie nationale et qu’elle peut conserver ses chances d’épanouissement politique, économique et culturel. C’est la thèse des autonomistes qui croient pouvoir se contenter d’une fraction d’indépendance.

[Seconde attitude]

L’autre attitude, très peu répandue après 1840 chez un peuple où l’on a abondamment parlé de nationalité et de nationalisme, pousse jusqu’à ses conclusions logiques la notion d’autonomie pour aboutir au principe des nationalités dans toute sa rigueur. ÊTRE UN PEUPLE MINORITAIRE DANS UNE FÉDÉRATION, C’EST ÊTRE UN PEUPLE ANNEXÉ. L’État n’est pas la nation, mais l’État est le principal instrument de l’épanouissement national. Il n’y a pas d’égalité politique entre le peuple majoritaire et le peuple minoritaire dans n’importe quelle fédération. Le peuple majoritaire a, à sa disposition, l’autonomie interne et externe. Le peuple minoritaire ne peut mettre à son service qu’une autonomie interne.

[Conclusion : « l’indépendance complète est absolument nécessaire ».]

L’annexion politique, dans une économie moderne et dynamique, entraîne inévitablement la subordination économique. L’infériorité politique et l’infériorité économique se conjuguent en s’aggravant. La culture elle-même, au sens le plus général du terme, intimement liée aux réalités politiques et économiques, est fortement perturbée au point qu’on ne peut même pas parler, pour le peuple minoritaire, de véritable autonomie culturelle. Pour cette école indépendantiste, l’indépendance complète est absolument nécessaire. Elle est à rechercher en elle-même comme un bien et elle est considérée comme un moyen irremplaçable pour assurer une maîtrise suffisante de la vie économique et culturelle.

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Le blog de Louis Bernard
Bruno Deshaies : « Indépendance ou sujétion »

Source : http://blogscienceshumaines.blogspot.com/search?q=blog+de+louis+bernard

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