samedi 8 novembre 2008

La notion d'indépendance dans l'histoire du Canada

Communication présentée par le professeur Maurice Séguin du Département d'histoire de l'Université de Montréal

Réunion annuelle de la Canadian Historical Association à l'Université de Montréal en juin 1956.

I. LE CONCEPT DE L'INDÉPENDANCE D'UNE COLLECTIVITÉ.

TENIR COMPTE DES AUTRES, MAIS AGIR PAR SOI-MÊME

o Indépendance n'est pas synonyme d'agir sans les autres,
o L'essence même de l'indépendance c'est d'agir (par soi-même).

L'AUTO-DÉTERMINATION : LE BIEN SUPRÊME ; SON ABSENCE : UN MAL RADICAL

o L'agir par soi est le substratum de la vie d'une collectivité.
o Toute privation d'indépendance est synonyme d'oppression.

L'INDÉPENDANCE À DEUX EST UNE IMPOSSIBILITÉ sur un même territoire

o Impossible de posséder chacun sa propre indépendance ;
o Impossible de posséder en commun une même indépendance.

ÊTRE ANNEXÉ À UN PEUPLE INDÉPENDANT N'EST PAS ÊTRE INDÉPENDANT

o Pas même être BIEN annexé.

L'ANNEXION ENGENDRE LA MÉDIOCRITÉ GÉNÉRALE COLLECTIVE

o Un milieu provincial.
o Une culture anémique.

N. B. : L'édition de 1956 comportait, dans l'énumération, cette autre note : « Un peuple annexé n'est pas intéressant. » En 1965-1966, cette phrase a été supprimée par Maurice Séguin.

VIVRE ou MOURIR - ou bien VÉGÉTER

o Indépendance,
o Assimilation totale.
o Annexion - survivance.

II. LA COURBE HISTORIQUE DE L'INDÉPENDANCE DES DEUX CANADAS.

AVANT 1760 : FONDEMENT DE L'INDÉPENDANCE D'UN CANADA FRANÇAIS

EN 1760 : DÉMOLITION DES POSSIBILIÉS D'INDÉPENDANCE DU CANADA :
NAISSANCE DU CANADA ANGLAIS

DÈS 1760 ET APRÈS 1760 : UNE GUERRE DE RACES
UNE ISSUE : ANNEXER LE CANADA FRANÇAIS


o Une guerre de races pour L'INDÉPENDANCE nationale.
o 1783 et 1791 aggravent et prolongent la guerre de races.
o Un dilemme : choisir entre le Canada du passé et le Canada de l'avenir.
o Vers 1824, la seule solution possible commence à se préciser :
- l'annexion du Canada français,
- l'annexion avec ménagements.
o En 1840, cette solution de base est appliquée.
o Bagot n'a pas trahi Durham.
o Et les réformistes n'ont pas modifié le caractère du régime.
o 1867 ne fait que reprendre l'arrangement de 1840.

UN SIÈCLE APRÈS 1760 : UN CANADA ANGLAIS NATION.
UN CANADA FRANÇAIS PROVINCE.

o Deux nations anglaises, une province française;
o Ou plus exactement : une province semi-française.
o Un peuple majeur indépendant et un peuple mineur annexé.
o Le drame des deux impossibles et de l'inévitable survivance.
- impossible indépendance.
- impossible disparition.
o inévitable survivance dans la médiocrité.
o La justesse de l'arrangement constitutionnel de 1867, en 1867. [Pour l'édition de 1965-1966, Séguin ajoute « en 1867 ».]

DEUX SIÈCLES APRÈS 1760 : MÊME CONTEXTE :

o Toujours au lendemain de 1760.
o Une défaite organique qui n'a rien perdu de son intensité.
o Toujours deux Canadas qui ne peuvent se fusionner.
o Les mêmes relations commandent leur coexistence.
[Pour l'édition de 1965-1966, Séguin ajoute cette dernière note dans l'énumération.]
o Parmi les Canadiens français ,
- les croulants (de 15 à 90 ans) acceptent…
- les jeunes (de 15 à 90 ans) se révoltent.

N. B. : Dans l'édition de ce texte, nous avons respecté la ponctuation originale ainsi que sa présentation matérielle (hormis les pastilles énumératives). Il s'agit de la dernière version éditée par Maurice Séguin.

NOTE PARTICULIÈRE :
La présente version provient de la feuille du cours HC.480 / 1965-66, non-paginée, et identifiée « REMAKE REVISÉ » (in Fonds Maurice-Séguin, ancienne cote P221, 2454/63/8/6/2). Nous indiquons les quelques modifications apportées par Maurice Séguin à la première version qui avait été publiée par la Canadian Historical Association dans le
Rapport annuel, 1956, p. 83-84.

POUR LES SCEPTIQUES :
Maurice Séguin, L'idée d'indépendance au Québec. Genèse et historique. Trois-Rivières, Les Éditions Boréal Express, 1971, 67 p. (Coll. « 1760 »). La mise au point de l'appareil critique a été effectuée par M. André Lefebvre. Publication de trois conférences prononcées à la télévision de Radio-Canada les 18 mars, 25 mars et 1er avril 1962.

lundi 1 septembre 2008

Un secret pour comprendre l’optique indépendantiste

Une lecture inattendue

Le texte que nous vous offrons ci-dessous en lecture a été écrit par Guy de Maupassant en 1888. Il s’agit de la Préface à l’édition originale du roman Pierre et Jean. Elle constitue une analyse qui traite du « Roman » comme forme de composition littéraire. C’est d’ailleurs le titre même de la Préface – une sorte de manifeste qui a fait du bruit à son époque.

Cent vingt ans plus tard, cette préface sur le roman nous révèle plus qu’une sorte d’exercice pour le plaisir des écrivains, mais un discours sur la composition d’une œuvre et du rôle de l’écrivain dans son œuvre. Mais encore plus. Maupassant va plus loin. Il veut comprendre les « procédés de composition » qui sont exercés par chacun de nous. Que ce soit pour un romancier ou pour un historien ou pour un citoyen, le processus est similaire. « Faire vrai. écrit-il, consiste donc à donner l'illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servilement dans le pêle-mêle de leur succession. »

Par exemple, un indépendantiste a sa propre « logique ordinaire des faits » et ce qu’il a à dire doit être exprimé clairement. Ainsi se pose le problème de la communication. Il faut donc apprendre à dire correctement la chose à dire.

Maupassant s’explique :

« Quelle que soit la chose qu'on veut dire, il n'y a qu'un mot pour l'exprimer, qu'un verbe pour l’animer et qu'un adjectif pour la qualifier. Il faut donc chercher, jusqu'à ce qu'on les ait découverts, ce mot, ce verbe et cet adjectif, et ne jamais se contenter de l'à-peu-près, ne jamais avoir recours à des supercheries, mêmes heureuses, à des clowneries de langage pour éviter la difficulté. (*)

On peut traduire et indiquer les choses les plus subtiles en appliquant ce vers de Boileau :

D'un mot mis en sa place enseigna le pouvoir.

Il n'est point besoin du vocabulaire bizarre, compliqué, nombreux et chinois qu'on nous impose […].
…mais il faut discerner avec une extrême lucidité toutes les modifications de la valeur d'un mot suivant la place qu'il occupe. »

Ce travail est exigeant. Si bien que Maupassant ajoute cette nuance : « Je compris ensuite que les écrivains les plus connus n'ont presque jamais laissé plus d'un volume et qu'il faut, avant tout, avoir cette chance de trouver et de discerner, au milieu de la multitude des matières qui se présentent à notre choix, celle qui absorbera toutes nos facultés, toute notre valeur, toute notre puissance artiste. »

C’est peut-être ça le secret de cette lecture inattendue.

Bruno Deshaies

Montréal, 1er septembre 2008
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(*) Un exemple de style de Maupassant dans Pierre et Jean :

La sortie en mer de Mme Roland.

« Cette sortie en mer l’avait ravie. […] Depuis le départ elle s’abandonnait tout entière, tout son esprit et toute sa chair, à ce doux glissement sur l’eau. Elle ne pensait point, elle ne vagabondait pas ni dans les souvenirs ni dans les espérances, il lui semblait que son cœur flottait comme son corps sur quelque chose de moelleux, de fluide, de délicieux, qui la berçait et l’engourdissait. » (Dans la Collection Parcours d’une œuvre sous la direction de Michel Laurin, Groupe Beauchemin, éditeur ltée, p. 17.)



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Guy de Maupassant (1850-1893)

“Le Roman”
(Préface à Pierre et Jean, 1888)

EXTRAITS

//258// Contester le droit d'un écrivain de faire une œuvre poétique ou une œuvre réaliste, c'est vouloir le forcer à modifier son tempérament, récuser son originalité […]
Lui reprocher de voir les choses belles ou laides, petites ou épiques, gracieuses ou sinistres, c'est lui reprocher d'être conformé de telle ou telle façon et de ne pas avoir une vision concordant avec la nôtre.

Laissons-le libre de comprendre, d'observer, de concevoir comme il lui plaira, pourvu qu'il soit un artiste. Devenons poétiquement exaltés pour juger un idéaliste et prouvons-lui que son rêve est médiocre, banal, pas assez fou ou magnifique. Mais si nous jugeons un naturaliste, montrons-lui en quoi la vérité dans la vie diffère de la vérité dans son livre.

Il est évident que des écoles si différentes ont dû employer des procédés de composition absolument opposés.

Le romancier qui transforme la vérité constante, brutale et déplaisante, pour en tirer une aventure exceptionnelle et séduisante, doit, sans souci exagéré de la vraisemblance manipuler les événements à son gré, les préparer et les arranger pour plaire au lecteur, l'émouvoir ou l'attendrir. Le plan de son roman n'est qu'une série de combinaisons ingénieuses conduisant avec adresse au dénouement. Les incidents sont disposés et gradués vers le point culminant et l'effet de la fin, qui est un événement capital et décisif, satisfaisant toutes les curiosités éveillées au début, mettant une barrière à l'intérêt, et terminant si complètement l'histoire racontée qu'on ne désire plus savoir ce que deviendront, le lendemain, les personnages les plus attachants.

[…]

//260// En somme, si le Romancier d'hier choisissait et racontait les crises de la vie, les états aigus de l'âme et du cœur, le Romancier d'aujourd'hui écrit l'histoire du cœur, de l'âme et de l'intelligence à l'état normal. Pour produire l'effet qu'il poursuit, c'est-à-dire l'émotion de la simple réalité, et pour dégager l'enseignement artistique qu'il en veut tirer, c'est-à-dire la révélation de ce qu'est véritablement l'homme contemporain devant ses yeux, il devra n'employer que des faits d'une vérité irrécusable et constante.

Mais en se plaçant au point de vue même de ces artistes réalistes, on doit discuter et contester leur théorie qui semble pouvoir être résumée par ces mots : "Rien que la vérité et toute la vérité."

Leur intention étant de dégager la philosophie de certains faits constants et courants, ils devront souvent corriger les événements au profit de la vraisemblance et au détriment de la vérité, car le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable.

Le réaliste, s'il est un artiste, cherchera, non pas à nous montrer la photographie banale de la vie, mais à nous en donner la vision plus complète, plus saisissante, plus probante que la réalité même.

Raconter tout serait impossible, car il faudrait alors un volume au moins par journée, pour énumérer les multitudes d'incidents insignifiants qui emplissent notre existence.

Un choix s'impose donc, - ce qui est une première atteinte à la théorie de toute la vérité.

La vie, en outre, est composée des choses les plus différentes, les plus imprévues, les plus contraires, les plus disparates ; elle est brutale, sans suite, sans chaîne, pleine de catastrophes inexplicables, //261// illogiques et contradictoires qui doivent être classées au chapitre faits divers.

Voilà pourquoi l'artiste, ayant choisi son thème, ne prendra dans cette vie encombrée de hasards et de futilités que les détails caractéristiques utiles à son sujet, et il rejettera tout le reste, tout l'à-côté.

Un exemple entre mille :

Le nombre des gens qui meurent chaque jour par accident est considérable sur la terre. Mais pouvons-nous faire tomber une tuile sur la tête d'un personnage principal, ou le jeter sous les roues d'une voiture, au milieu d'un récit, sous prétexte qu'il faut faire la part de l'accident ?

La vie encore laisse tout au même plan, précipite les faits ou les traîne indéfiniment. L'art, au contraire, consiste à user de précautions et de préparations, à ménager des transitions savantes et dissimulées, à mettre en pleine lumière, par la seule adresse de la composition, les événements essentiels et à donner à tous les autres le degré de relief qui leur convient, suivant leur importance, pour produire la sensation profonde de la vérité spéciale qu'on veut montrer.

Faire vrai consiste donc à donner l'illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servilement dans le pêle-mêle de leur succession. J'en conclus que les Réalistes de talent devraient s'appeler plutôt des Illusionnistes.

Quel enfantillage, d'ailleurs, de croire à la réalité puisque nous portons chacun la nôtre dans notre pensée et dans nos organes. Nos yeux, nos oreilles, notre odorat, notre goût différents créent autant de vérités qu'il y a d'hommes sur la terre. Et nos esprits qui reçoivent les instructions de ces organes, diversement impressionnés, comprennent, analysent et jugent comme si chacun de nous appartenait à une autre race.

Chacun de nous se fait donc simplement une illusion du monde, illusion poétique, sentimentale, joyeuse, mélancolique, sale ou lugubre suivant sa nature. Et l'écrivain n'a d'autre mission que de reproduire fidèlement cette illusion avec tous les procédés d'art qu'il a appris et dont il peut disposer.

Illusion du beau qui est une convention humaine ! Illusion du laid qui est une opinion changeante ! Illusion du vrai jamais immuable ! Illusion de l'ignoble qui attire tant d'êtres ! Les grands artistes sont ceux qui imposent à l'humanité leur illusion particulière.

//262// Ne nous fâchons donc contre aucune théorie puisque chacune d'elles est simplement l'expression généralisée d'un tempérament qui s'analyse.

[…]

//265// Deux hommes par leurs enseignements simples et lumineux m'ont donné cette force de toujours tenter : Louis Bouilhet et Gustave Flaubert.

Si je parle ici d'eux et de moi, c'est que leurs conseils, résumés en peu de lignes, seront peut-être utiles à quelques jeunes gens moins confiants en eux-mêmes qu'on ne l'est d'ordinaire quand on débute dans les lettres.

Bouilhet, que je connus le premier d'une façon un peu intime, deux ans environ avant de gagner l'amitié de Flaubert, à force de me répéter que cent vers, peut-être moins, suffisent à la réputation d'un artiste, s'ils sont irréprochables et s'ils contiennent l'essence du talent et de l'originalité d'un homme même de second ordre, //266// me fit comprendre que le travail continuel et la connaissance profonde du métier peuvent, un jour de lucidité, de puissance et d'entraînement, par la rencontre heureuse d'un sujet concordant bien avec toutes les tendances de notre esprit, amener cette éclosion de l'œuvre courte, unique et aussi parfaite que nous la pouvons produire.

Je compris ensuite que les écrivains les plus connus n'ont presque jamais laissé plus d'un volume et qu'il faut, avant tout, avoir cette chance de trouver et de discerner, au milieu de la multitude des matières qui se présentent à notre choix, celle qui absorbera toutes nos facultés, toute notre valeur, toute notre puissance artiste.

Plus tard, Flaubert, que je voyais quelquefois, se prit d'affection pour moi. J'osai lui soumettre quelques essais. Il les lut avec bonté et me répondit : "je ne sais pas si vous aurez du talent. Ce que vous m'avez apporté prouve une certaine intelligence, mais n'oubliez point ceci, jeune homme, que le talent - suivant le mot de Buffon - n'est qu'une longue patience. Travaillez."

[…]

//267// Quelle que soit la chose qu'on veut dire, il n'y a qu'un mot pour l'exprimer, qu'un verbe pour l'animer et qu'un adjectif pour la qualifier. Il faut donc chercher, jusqu'à ce qu'on les ait découverts, ce mot, ce verbe et cet adjectif, et ne jamais se contenter de l'à-peu-près, ne jamais avoir recours à des supercheries, mêmes heureuses, à des clowneries de langage pour éviter la difficulté.

On peut traduire et indiquer les choses les plus subtiles en appliquant ce vers de Boileau :

D'un mot mis en sa place enseigna le pouvoir.

Il n'est point besoin du vocabulaire bizarre, compliqué, nombreux et chinois qu'on nous impose aujourd'hui sous le nom d'écriture artiste, pour fixer toutes les nuances de la pensée ; mais il faut discerner avec une extrême lucidité toutes les modifications de la valeur d'un mot suivant la place qu'il occupe. Ayons moins de noms, de verbes et d'adjectifs aux sens presque insaisissables, mais plus de phrases différentes, diversement construites, ingénieusement coupées, pleines de sonorités et de rythmes savants. Efforçons-nous d'être des stylistes excellents plutôt que des collectionneurs de termes rares.

Il est, en effet, plus difficile de manier la phrase à son gré, de lui faire tout dire, même ce qu'elle n'exprime pas, de l'emplir de sous-entendus, d'intentions secrètes et non formulées, que d'inventer des expressions nouvelles ou de rechercher, au fond de vieux livres inconnus, toutes celles dont nous avons perdu l'usage et la signification, et qui sont pour nous comme des verbes morts.

O O O

RÉFÉRENCE :

Guy de MAUPASSANT, Pierre et Jean, Montréal, Beauchemin, 2001, 271 p. Texte intégral. Édition présentée, annotée et commentée par Nicole Kougioumoutzkis (Coll. « Parcours d’une œuvre » sous la direction de Michel Laurin). ISBN : 2-7616-1215-9. ICI pour l’une des éditions électroniques en ligne :
http://www.actualitte.com/ressources/84-Guy-Maupassant-Pierre-Jean-Preface.htm
Les numéros de pages réfèrent à l’édition Beauchemin (aujourd.hui La Chenelière).

jeudi 7 août 2008

Entre la légitimité canadienne et le point Omega de l’indépendance

« L’opinion publique peut-elle aller plus vite que celle de ses élites… »

Selon un chroniqueur de Vigile.net, monsieur André Savard, la position des défenseurs de l’indépendance du Québec constituerait « une haute forme de catéchèse » qui serait « le point Omega de l’indépendance ». Quel compliment ! Ne vous trompez pas. Pour monsieur Savard, les indépendantistes négligent « le support de l’opinion publique tel qu’il s’offre aujourd’hui ».

Une question se pose. L’opinion publique peut-elle aller plus vite que celle de ses élites sur le thème de l’indépendance du Québec ? Nos élites nagent dans la confusion et ainsi va l’opinion publique bombardée par la propagande de Radio-Cadenas et tous les supports électroniques très nombreux d’ordre institutionnel qui distillent jour et nuit la pensée fédéraliste. On aimerait bien connaître la pensée du silencieux Gérald Larose sur les propos anthropologiques de monsieur Savard au sujet de l’indépendance collective de la nation québécoise. Que fait le Conseil de la souveraineté en ce moment.

______________

« La position du Québec »
http://www.vigile.net/Nouvel-article,14575

mardi 5 août 2008

Le PI fera-t-il à lui seul l’indépendance du Québec ?

Le PI et le mythe de la division du vote indépendantiste


Éric Tremblay affirme :

« Si tous les indépendantistes ne participent pas au développement du P.I., il en sera fini de l’indépendance. Nous mourrons tous Canadians et plus vite qu’on ne le croit. »

Remarque liminaire :

La situation des Québécois-Français n’est pas de tout repos au sein du Canada. En revanche, l’indépendance du Québec offrirait aux Québécois des moyens supérieurs et plus étendus pour défendre ses intérêts nationaux comme il le pense et comme il le veut dans un nouveau contexte de relations interétatiques et non de subordination politique et d’annexion, soit de subordination sur place tant politique qu’économique et culturelle.

Réaction au texte d’Éric Tremblay (voir le lien à la fin de ce texte) :

4 août 2008

Les indépendantistes se combattent comme des diables dans l’eau bénite. À chacun sa vérité. Pourtant, nous avons une histoire qui peut nous faire comprendre que sans l’union de tous les indépendantistes, aucun parti politique ne sera en mesure de faire à lui seul l’indépendance du Québec. Ils doivent tous se rallier, se mettre ensemble et faire le forcing nécessaire pour METTRE ENFIN AU MONDE LA COALITION AU SEIN D’UN MÊME MOUVEMENT.

La division du vote indépendantiste ne peut pas être un mythe. Lorsqu’un parti politique devient officiellement reconnu par le DGE, il accepte de facto d’entrer en lutte contre les autres partis politiques. Les luttes électorales sont de cette nature et elles demeureront toujours des luttes DANS le régime.

Quant au « si les indépendantistes… », on ne peut pas conclure ipso facto qu’« il en sera fini de l’indépendance » après l’échec du PI. Cette vision est terriblement réductrice des forces agissantes dans l’histoire.

Raisonner de cette manière, c’est supposer que le PI, même s’il gagnait l’élection, n’aurait d’opposition ni au Parlement ni dans la société québécoise et canadienne. Rappelons que quand on est un parti politique officiel, il faut suivre des règles établis par défaut – la démocratie l’exige. Les adversaires du PI lui apprendront à la dure s’il déroge à ces règles ainsi qu’aux normes démocratiques. Ils ne lui feront pas de quartiers. Là, comme ailleurs, c’est la loi du plus fort (ET DANS CE CAS, C’EST LE NOMBRE) qui sera toujours la meilleure comme nous l’a enseigné le fabuliste LaFontaine dans Les animaux malades de la peste.

Il faut maintenant se placer au plan des faits. Par conséquent, évitons donc l’intelligence sophistique (cf. « Bref débat… » ci-dessous).

Annexion ou indépendance ?
http://blogscienceshumaines.blogspot.com/2008/08/annexion-ou-indpendance-histoire-de.html

Bref débat au sujet de la série de chroniques sur l’histoire des deux Canadas.
http://blogscienceshumaines.blogspot.com/2008/08/bref-dbat-au-sujet-de-la-srie-de.html

Éric Tremblay, « La division du vote indépendantiste : un mythe. »
http://www.vigile.net/La-division-du-vote#


Bruno Deshaies

5 août 2008

lundi 4 août 2008

BREF DÉBAT AU SUJET DE LA SÉRIE DE CHRONIQUES SUR L'HISTOIRE DES DEUX CANADAS

INDÉPENDANCE DU QUÉBEC 330
Le Canada actuel (30)
Une population dispersée, une grande mosaïque multiculturelle, les résidus d’un Canada-Français bilingue, le Québec toujours province et un CANADA indépendant, mais État-Nation satellite des États-Unis
Bruno Deshaies
Vigile.net, jeudi 19 juin 2008
ICI : http://www.vigile.net/Le-Canada-actuel-30

Nous donnons ci-dessous l’opinion d’un internaute sur cette dernière chronique ainsi que notre réponse à son point de vue.

Vos commentaires:

Le Canada actuel (30)
19 juin 2008, par Gilles Bousquet

Vous concluez : « L’histoire du régime de l’Union nous démontre la nécessité d’unir les efforts des souverainistes plutôt que de mener continuellement des luttes intestines. »

Très bien mais, qui va lâcher le premier ses principes et ses idées fixes pour joindre un groupe uni de souverainistes ? Québec solidaire plus à gauche que souverainiste ? Le PI dont les dirigeants pensent que le PQ est un groupe d’arrivistes fédéralistes, trop mous de l’option, l’ADQ qui ne semble plus trop savoir ce qu’il souhaite comme autonomie sauf que ça doit être à droite et dans le Canada ou le parti Vert, full-fédéraliste ?

Le Canada actuel (30)

RÉPONSE :

Doit-on « lâcher le premier ses principes et ses idées fixes » ?

4 août 2008 Bruno Deshaies

Je veux bien respecter l’opinion de cet internaute mais l’ANNEXION c’est l’ANNEXION que ce soit dans une fédération ou une confédération, c’est la même chose. Que le régime soit peu ou très centralisé, ce fait ne change rien aux effets néfastes du fédéralisme d’un point de vue indépendantiste.

À tous les sceptiques, je conseillerais de consulter le célèbre mémoire de la Société Saint-Jean-Baptiste présenté le 13 mars 1954 à la commission royale d’enquête sur les problèmes constitutionnels créée par Maurice Duplessis. Le 25 octobre 1954, dans une « Lettre – Préface » à l’occasion de la publication du mémoire, le président général de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, Me J.-Eugène Therrien, écrivait :

« Ce volume, intitulé CANADA-FRANÇAIS ET UNION CANADIENNE, s’adresse à tous les Canadiens français qui n’ont pas renoncé à l’avenir de leur nationalité. (p.10) »

Ce mémoire était en quelque sorte un manifeste de 127 pages contre les défenseurs assidus de l’UNITÉ CANADIENNE.

On y lit sous le sous-titre de « Réforme constitutionnelle » l’énoncé suivant :

« Ayant prouvé sa ferme volonté de défendre, sans provocations inutiles, l’autonomie culturelle des Canadiens français, l’État provincial du Québec sera en mesure de demander à son partenaire anglo-canadien de compléter le statut spécial que la constitution de 1867 lui avait accordé. (p. 124) »

Le mémoire ajoute immédiatement certaines précisions :

« La question se ramène toujours à ceci : donner à la minorité canadienne-française, habitant en immense majorité l’État provincial du Québec, le minimum de sécurité pour assurer son autonomie culturelle en s’arc-boutant sur un gouvernement provincial canadien-français capable de le soutenir. (p. 124) »

Cet état d’esprit est brièvement expliqué dans la Conclusion de la section consacrée aux « Relations entre le Québec et le Canada Anglais » (p. 115-125) du mémoire :

« On peut résumer ainsi le programme tracé :

« Il est nécessaire pour les Canadiens français de prendre conscience qu’ils forment une Nation-État (1). De même que les Anglo-Canadiens s’appuient sur le gouvernement central comme sur leur pôle politique naturel, les Canadiens français doivent apprendre à considérer leur gouvernement provincial du Québec comme le gardien légitime du bien commun de leur nationalité. Ils s’efforceront d’en faire un grand gouvernement moderne, pleinement conscient de ses lourdes responsabilités et ayant la ferme volonté et les moyens de s’en acquitter.

« (1) Nous employons l’expression Nation-État dans un sens très particulier. La Conquête de 1760 a enlevé aux Canadiens français la liberté de devenir une Nation-État souveraine. Néanmoins, ils ont obtenu un État provincial qu’ils peuvent mettre au service de leur nationalité. »

À cette conclusion s’ajoute une Conclusion générale où l’on peut lire les intentions des auteurs du mémoire (dont on sait que l’auteur principal fut l’historien Michel Brunet, professeur d’histoire à l’Université de Montréal).
VOIR : http://www.rond-point.qc.ca/histoire/rin/manifeste.html

Pour résumer la position de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, citons deux paragraphes du Chapitre sixième et dernier chapitre du mémoire.

« Ce Mémoire propose un programme politique, économique et social susceptible d’apporter au problème canadien-français une solution moins incomplète que celle que les générations précédentes ont dû improviser. L’heure des cataplasmes est passée. Les Canadiens français de 1954 ont les moyens d’action que leurs ancêtres, malheureusement, n’avaient pas. Sauront-ils les utiliser ?

[…]

Les Canadiens français continueront-ils à se soumettre presque sans réagir aux déterminismes de leur tragique histoire ? Auront-ils le courage de leur opposer une volonté unanime de résistance ? La réponse appartient aux générations actuelles. Celles qui suivront n’auront plus la liberté de choisir. (p. 126 et 127) »

O O O

Maintenant que l’option indépendantiste a été choisie par une bonne partie de la population québécoise, faut-il continuer à en débattre éternellement ?

L’indépendance n’est pas une question de générations ou d’individus, c’est un SUJET collectif, NATIONAL.

Ce problème ayant été débattu abondamment au cours de notre histoire, pourquoi faudrait-il, à la fin, revenir inlassablement à la case départ ? Pourquoi imaginer qu’une génération ne peut pas continuer avec l’autre le même combat sans s’arrêter en cours de route à cause de l’âge, de la maladie, de la vieillesse ou de la fin d’une carrière riche de sens et d’accomplissement ? Pourquoi tous ces replis ? Quelle peut en être la justification ? Faut-il croire que les générations successives n’y croyaient pas vraiment ? Si c’était le cas, ce serait une véritable tragédie nationale.

Nous comprenons l’exaspération de monsieur Gilles Bousquet. Nous comprenons qu’il désire trouver une solution pertinente au sort des Québécois-Français comme nous comprenons qu’il a le droit de raisonner dans l’optique fédéraliste. Malheureusement, l’avenir est complètement bloqué et, par conséquent impraticable dans cette direction.

Un coup d’œil sur les deux événements qui suivent pourrait faire réfléchir les sceptiques indépendantistes.

1991 Adoption du rapport Allaire par le Parti libéral du Québec
9 mars 1991. Lors du 25e congrès du Parti libéral du Québec (PLQ), Jean Allaire présente un rapport intitulé « Le Québec libre de ses choix ». Il presse le gouvernement provincial de récupérer d’Ottawa de larges responsabilités et pouvoirs.
ICI : http ://www.bilan.usherbrooke.ca/bilan/motsClesCheck.jsp

1994 Tenue du congrès de fondation de l’Action démocratique du Québec
6 janvier 1994. Plus de 600 militants sont réunis à Laval pour prendre part à la formation d’un nouveau parti politique québécois : l’Action démocratique du Québec (ADQ). Satisfait par le travail accompli au cours de ces journées, un des pionniers du parti, Jean Allaire, déclare : « nous sommes le parti de l’avenir ».
ICI : http ://www.bilan.usherbrooke.ca/bilan/motsClesCheck.jsp

Cette histoire à court terme s’inscrit nécessairement dans la grande histoire des Québécois-Français d’hier à aujourd’hui. Niez ce fait de longue durée, c’est faire la politique de l’autruche. Les beaux parleurs pourront pérorer indéfiniment en appelant à la barre la philosophie politique, le pragmatisme politique, le bon sens du charbonnier, l’appel de la race ou les récits historiques anecdotiques que les forces profondes de l’histoire canadienne ne changeront pas pour autant.

Les indépendantistes n’ont pas une fixation. Au contraire, ils affirment sciemment, consciemment et démocratiquement que le principe indépendantiste de l’autonomie interne et externe vaut autant que celui du fédéralisme des États-Nations souveraines. Alors, ils souhaitent persuader leurs concitoyens de la valeur et de la légitimité politique de leur point de vue. Les accuser de défendre une idée fixe relève de la partisannerie politique et d’une certaine forme de mesquinerie intellectuelle.

Si l’on reprend le mémoire de 1954 de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, force est d’admettre que le Québec a pu se développer depuis cinquante ans. Cependant, il est toujours coincé dans le Canada entre l’assimilation totale et l’indépendance complète sinon il vivra en appendice éternellement quémandeur de subsides, comme il l’a toujours fait. Or, ce n’est pas l’OPTION des INDÉPENDANTISTES.

Cette voie, apparemment plus périlleuse, a le grand mérite de rendre la collectivité québécoise responsable globalement de tout ce qu’elle aura à faire en étant servi par un État québécois souverain. Elle deviendra au sens fort du terme « maître de son destin » en apprenant à vivre avec les autres, mais par soi.

(30)

ANNEXION OU INDÉPENDANCE ?

Histoire de deux nationalismes au Canada

Maurice Séguin
Cours HIST-585
Département d'histoire
Université de Montréal
1961-1962

Au cours des dernières années de sa carrière universitaire, l'Annuaire universitaire de l'université de Montréal annonçait le cours de synthèse du professeur Maurice Séguin sous le titre qui suit : Les deux nationalismes . Histoire du conflit politique, économique et culturel entre le Canada français et le Canada anglais : 1760-1960.

Le PREMIER Canada

http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-1-5
http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-2-5
http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-3-5
http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-4-5
http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-5-5

Le DEUXIÈME Canada

http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-1-29
http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-2-29
http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-3-29
http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-4-29
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http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-27-29
http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-28-29
http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-29-29
http://www.vigile.net/Le-Canada-actuel-30

N. B. L’histoire du PREMIER et du DEUXIÈME Canada est précédée d’un abrégé du cours sur Les Normes pour servir à l’étude de l’histoire des deux Canadas. Cette partie n’a pas été incluse dans la synthèse explicative de l’histoire des deux Canadas. La version des Normes de 1961-1962 fait l'objet en ce moment d'une publication répartie sur 24 chroniques du jeudi sur le site Internet VIGILE.NET. La publication a débuté le 13 novembre 2008 sous le titre : Les NORMES en histoire. BD (23 mars 2009)

mercredi 16 juillet 2008

L’indépendance constitue le pare-feu par excellence contre la subordination politique sur place dans le fédéralisme

Le cadre fédéral n’est pas immuable. Toutefois, les prétentions des Québécois à vouloir modifier le cadre constitutionnel de 1867 (qui est le prolongement de 1840) les obligent à préparer des opérations politiques largement plus étendues que de s’engager dans un exercice pédagogique qui les soulagerait du mal du centralisme canadian par l’illusion de la rédaction d’une constitution provinciale.

Il faut se donner la peine de lire les débats parlementaires sur la constitution en 1864-1865 au Canada pour réaliser que la centralisation n’est pas un effet de l’évolution historique du Canada mais bel et bien une condition in se de la constitution canadienne. Par conséquent, nous assistons depuis 1867 à la manifestation d’un gouvernement canadian et du Canada-Anglais à confirmer et à défendre ce fondement de la constitution canadienne. « Le Québec, comme l’avait déclaré en 1954 Louis Stephen St-Laurent, est une province comme les autres.» Il ne faisait rien d’autres que de proclamer que le gouvernement canadien possède toutes les compétences qui lui permettent d’agir en tant que gouvernement central et qu’il n’était pas l’émanation de pouvoirs accordés par les États locaux ou régionaux à l’État central. Ce n’est ni le contenu ni l’esprit du B.N.A. Act.

« Seul un changement révolutionnaire du statut politique du Québec peut apporter un changement fondamental. »

La « conception administrative du fédéralisme » de l’État canadien n’est pas la principale cause des déboires des souverainistes. Leur principale erreur, c’est qu’ils ne croient pas que le MAL réside dans la constitution canadienne elle-même. Ce n'est donc pas, par exemple, un problème uniquement de déséquilibre fiscal. Seul un changement révolutionnaire du statut politique du Québec peut apporter un changement fondamental. Trop souvent, les réformistes fédéralistes ou souverainistes sont des partisans inconscients du régime fédéral canadien. Ils raisonnent tous les deux dans l’optique fédéraliste. D’où l’embarras et l’ennui de la population québécoise devant autant de confusion. Il y a un malaise profond que les chefs péquistes et bloquistes ainsi que l’élite souverainiste ne parviennent pas à transformer.

Pour ceux qui aimeraient voir le problème du fédéralisme canadien dans l’optique indépendantiste, je leur suggérerais de lire les deux leçons de Maurice Séguin consacrées à l’étude de la « Création du Dominion of Canada 1864-1867» (Leçon XV) et « Le Canada, le Québec et l’Empire 1867-1960» (Leçon XVI) dans Histoire de deux nationalismes au Canada (Montréal, Guérin Éditeur, 1997). Rien n’a changé depuis dans le fonctionnement du fédéralisme canadien.

Les Québécois sont programmés pour penser dans l’optique fédéraliste au lieu que dans l’optique indépendantiste. Cette conclusion n’exclut pas les autres dangers qui guettent le PI pour faire l’indépendance du Québec. Pour réaliser l’indépendance du Québec, les Québécois ont absolument besoin de se déprogrammer ainsi que de décrocher complètement de l’optique fédéraliste. En d’autres termes, les Québécois doivent cesser d'avoir un lien d'attachement, de dépendance ou d’intérêt comme état provincial au sein du Canada-Anglais sous quelque forme que soit cette annexion (par ex. : souveraineté-association, partenariat, état autonome, fédéralisme décentralisé, etc.). Adieu à tous ces mythes fédéralistes. Le vrai fédéralisme existe, bien sûr, mais il est par essence centralisateur.


Bruno Deshaies

Montréal, 16 juillet 2008

mercredi 13 février 2008

LA MISSION GOSFORD AU BAS-CANADA 1835-1837

Suivie par la double insurrection des Britanniques de Montréal et d’une fraction du parti réformiste canadien-français

PRÉSENTATION

Signalons à nos internautes lecteurs et lectrices que cet article est lié à notre chronique no 313 du jeudi 14 février 2008 portant sur l’histoire des deux Canadas. Nous vous invitons à vous rendre sur le site Internet VIGILE.NET pour lire cette chronique qui est en lien avec l’étude de cette mission très particulière de Lord Gosford en vue de résoudre la double crise (politique et nationale) au Canada.

Il ne faut pas ignorer que le rapport des commissaires est déposé le 15 novembre 1836 ; il comprend six rapports. Les commissaires ont joui d’une très grande liberté pour exprimer leur point de vue. Par conséquent, les pistes de solutions ne sont pas partagées entièrement par chacun des commissaires. À telle enseigne que Gosford et Grey anticipent déjà que devant la possibilité d’une révolte, il faudra avoir « recours aux grands moyens ». D’ailleurs, Gosford devra faire appel à l’armée. À partir de ce moment-là, la mission de paix et de conciliation devient un échec.

Les années du gouvernement de Lord Gosford sont instructives pour nous tous, – même aujourd’hui. Le séparatisme de la Constitution de 1791 n’était qu’un leurre. Les Canadiens s’étant comportés comme une MAJORITÉ, ils ont dû à leur corps défendant reconnaître qu’ils avaient subi la défaite en 1760. Les années 1835, 1836 et 1837 sont cruciales pour l’avenir du groupe canadien-français. L’étape suivante couvre les années 1838, 1839 et 1840, soit la courte période de la mission Durham. Elle entraînera définitivement les Canadiens-Français dans l’Annexion.

Les Québécois devraient être assez lucides aujourd’hui pour reconnaître que leur adaptation au processus du parlementarisme du régime constitutionnel de 1791 a eu un impact très fort sur leur comportement comme nationalité. Ils ont découvert un pouvoir qu'ils pouvaient exercer, mais qu'ils ne pouvaient pas complètement contrôler – d'où l'échec de la mission Gosford. Par la suite, la confusion qui a régné entre le combat politique (plus particulièrement parlementaire) et la lutte nationale (Canadiens-Français vs Canadiens-Anglais, de nation à nation) a laissé des traces indélébiles dans le subconscient de la nation québécoise d’aujourd’hui. Les rêves souverainistes d’autonomie provinciale, de statut particulier, d’association, de partenariat, d’égalité entre les deux nations ou de l’autonomisme à petits pas de ces derniers mois ne sont que des succédanées de notre passé historique.

La rupture avec ce passé nécessite une profonde et vaste prise de conscience de la part de tous les Québécois, mais en particulier des Québécois-Français, en vue de réaliser le changement qualitatif de statut politique qu’ils subissent depuis leur insertion collective dans le DEUXIÈME CANADA.

Pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants de cette trajectoire collective, nous présentons ci-dessous l’analyse du rapport Gosford par l’historien Maurice Séguin dans son Histoire de deux nationalismes au Canada.

Bruno Deshaies
Montréal, 12 février 2008

Histoire de deux nationalismes au Canada (1997)

LEÇON X

EXASPÉRATION DE LA CRISE 1834-1837

EXTRAIT
//p. 264//

VII. ─ RAPPORT GOSFORD-GIPPS-GREY

21. Origine de la lutte politique et nationale

Les commissaires ne peuvent s’empêcher d’esquisser une très brève histoire du Québec depuis la Conquête. La première constitution, celle de 1763, semble avoir eu pour principe de travailler à rendre la colonie entièrement britannique. « Si on avait persisté dans la politique d’assimilation, affirment les commissaires, la situation serait aujourd’hui beaucoup plus calme que celle que nous connaissons. Cependant, la guerre d’Indépendance a fait mettre de côté la constitution de 1763 et l’Acte de Québec de 1774 a été voté. » Ces deux constitutions tendent à empêcher l’assimilation des Canadiens-Français.

En plus, s’est ajoutée la séparation de 1791 par laquelle le Bas-Canada a été de nouveau forcé par une loi du Parlement impérial à demeurer français ; en même temps on a octroyé aux Canadiens-Français une Chambre d’assemblée dont la très grande majorité des députés ne pouvaient être que des Canadiens-Français. Devant cette situation, les Britanniques se sont défendus par l’intermédiaire des Conseils. Et au cours de la lutte, l’assemblée composée presqu’exclusivement de Canadiens-Français a constamment fait figure de défenseur des droits populaires et des institutions libérales tandis que les Conseils où l’intérêt anglais prévalait, sont apparus comme les défenseurs du pouvoir arbitraire et de doctrines politiques démodées.

La majorité de l’assemblée qui réclame un Conseil législatif électif regarde cette réforme comme un moyen seulement pour arriver à d’autres fins. Entre autres, on demande que les affaires intérieures de la province soient conduites par un ministère responsable envers l’assemblée. « Ce serait, disent les commissaires, virtuellement l’indépendance, sous la présidence nominale d’un gouverneur britannique. »

//p. 265//
22. Les adversaires en présence

Les commissaires libéraux envoyés par un gouvernement libéral ne peuvent se prononcer, sans nuances, contre un Conseil législatif électif. Dans une colonie habitée par une population homogène et unie, ils approuveraient une telle réforme, mais tel n’est pas le cas dans le Bas-Canada.

« Dans l’ensemble, disent les commissaires, les Canadiens du Bas-Canada ne songent pas à rompre immédiatement avec l’Angleterre ; au contraire, ils désirent encore bénéficier de la protection de la Grande-Bretagne et ainsi s’épargner les frais de se défendre eux-mêmes. Mais, par contre, ils cherchent tout naturellement à accaparer toute l’autorité réelle dans les affaires intérieures dans le pays.»

De l’avis des commissaires, les colons britanniques ont bien compris les interpellations de Thom [auteur des Anti-Gallic letters] ainsi que les proclamations des Britishers du Lower Canada. Ils ne peuvent accepter ce gouvernement canadien-français. Les commissaires affirment : « Les Britanniques ne consentiront jamais dans le Lower Canada, sans une lutte armée, à l’établissement de ce qu’ils regardent comme une république française au Canada. »

23. Maintien du lien impérial

Grey ajoute en son nom personnel : « Si la question était simplement de savoir par quel moyen prolonger la souveraineté de l’Angleterre sur le Canada, je crois que ce serait en conservant le pays aussi français que possible. »

Mais le maintien du lien impérial, continue Grey, ne saurait être recherché par de tels moyens. Il ne s’agit pas d’un simple empire de domination sur des étrangers. La fin légitime de la colonisation est d’étendre aussi loin que possible sur terre, nos lois, notre langue, nos institutions [anglaises]. Dans la poursuite d’un tel but nous ne devons pas craindre que nos colonies puissent devenir éventuellement indépendantes, mais nous habituer à regarder l’indépendance comme l’aboutissement naturel de la colonisation de peuplement.

(p. 266)
Et Grey d’entrevoir l’avenir d’une manière dramatique :

Nous ne devons pas sacrifier notre colonisation britannique pour prolonger [en maintenant le pays français] une domination [de la Grande-Bretagne] qui sera à peu près nominale. Dans cette dernière hypothèse, le parti anglais prendra les armes et deviendra probablement l’agresseur et la Grande-Bretagne pour préserver le Bas-Canada [comme une quasi-république française] devra diriger ses forces armées contre des hommes qui sont nos compatriotes [la minorité britannique du Lower Canada] et les immigrants venus des îles britanniques.

VIII.─ PROPOSITIONS GREY

24. Nécessité de nouvelles structures

Impossible, dit Grey, de résoudre le problème de l’affrontement des Canadiens-Français et des Canadiens-Anglais en maintenant intactes les structures actuelles du Lower Canada.

Les Britanniques du Lower Canada ne peuvent légiférer sur les affaires intérieures des Canadiens-Fran­çais. D’autre part, les Canadiens-Français ne peuvent légiférer sur les intérêts des Britanniques du Lower Canada et sur une colonie britannique qui est le cœur, la vie, la force de tout le British North America. Les Canadiens sont en majorité dans le Bas-Canada, mais cette province n’est qu’une des cinq colonies du British North America et elle est la clé de cet ensemble colonial.

25. Fédération d’un Bas-Canada divisé

Grey propose donc, à l’instar de 1791, que le Bas-Canada soit divisé en plusieurs districts dotés chacun d’une législature locale subordonnée à une législature générale. Les villes de Québec, Montréal et les régions de Sherbrooke et de Hull seraient des centres britanniques. Les Canadiens-Français, dans ce qui resterait du Lower Canada, auraient pour capitale, la ville des Trois-Rivières. Le Canada-Français comprendrait surtout la zone seigneuriale, et, à l’intérieur de cette zone, les Canadiens-Français seraient maîtres de leur politique ; ils seraient libres de développer leur particularisme tandis que les Britanniques des villes de Québec, de Montréal et des Townships qui environnent (p. 267) Sherbrooke et Hull seraient libres de vivre en Britanniques avec des institutions britanniques.

Selon le plan de Grey, une législature générale où prévaudraient les Britanniques s’occuperait des grands objets d’intérêt mutuel : la navigation du Saint-Laurent, le revenu [ce qui est très important comme fonction gouvernementale] et la colonisation des zones non peuplées. Plus tard, le Upper Canada pourrait se joindre à ce premier noyau de fédération dans le Lower Canada. On le constate, la formule Grey est une nouvelle édition, une nouvelle forme de l’utilisation du principe fédéraliste pour régler le cas canadien-français en les mettant en minorité.

IX.─ POSITION DE GOSFORD ET GIPPS (1836-1837)

Les commissaires Gosford et Gipps soulignent les dangers d’une intervention limitée ; ils souhaitent plutôt faire suspendre la constitution du Lower Canada.

À la fin de 1836, au début de 1837, la crise est si aiguë que Gosford et Gipps écartent la solution proposée par Grey. Évidemment, on n’aurait pas le temps de remanier toutes les structures du Lower Canada et de mettre en œuvre un projet général de fédération des districts.

Les commissaires rejettent également les plans d’Union des deux Canadas, du moins pour le moment. « C’est là, écrivent-ils, une solution qui ne doit pas être envisagée, excepté si l’on parvenait à obtenir l’appui d’une majorité dans chacune des provinces à unir. » Or, à cette époque, la législature du Upper Canada, protestent contre les projets d’Union mis de l’avant par les Montrealers.

Quant à l’intervention limitée, partielle, de l’autorité impériale afin de reprendre, sans le consentement de l’assemblée canadienne-française, certaines sources de revenus pour subvenir aux frais d’administration, une formule suggérée par Londres, les commissaires doutent fort que cette politique soit de bonne guerre.

De l’avis des commissaires, ne serait-il pas mieux dans les circonstances de suspendre tout simplement la constitution du Bas-Canada ? (p. 268) On n’aurait qu’à dire que cette suspension est devenue nécessaire à cause des difficultés soulevées par la présence des deux nationalités. Un tel geste provoquerait moins d’agitation. Ce serait moins vexant pour les autres colonies ou législatures des autres colonies du British North America ; elles ne pourraient voir là un précédent qui viendrait un jour permettre de restreindre leurs libertés de contrôler le vote des subsides. « Une telle intervention radicale, disent les commissaires, pourrait peut-être faire réfléchir les Canadiens-Français, les amener à composer. Mais si cette politique mène quand même à la révolte, alors on aura recours aux grands moyens. »

LEÇON XI

CRISE DE 1837 ET RAPPORT DURHAM 1837-1839

//p. 273//
I.─ CRISE 1837 ET CONSÉQUENCES IMMÉDIATES

1. Riposte de Russell aux Quatre-vingt douze résolutions

Les dix résolutions Russell du mois de mars 1837 répondent aux Quatre-vingt-douze résolutions canadiennes-françaises de 1834. Russell, ministre des Affaires intérieures, réaffirme la volonté du gouvernement de Londres d’améliorer la composition des Conseils législatif et exécutif ; le ministre ajoute cependant qu’il est imprudent de transformer le Conseil législatif en un corps électif, vu l'état de la colonie, et qu’il est peu sage de soumettre le Conseil exécutif à la responsabilité demandée par l’assemblée du Bas-Canada. De plus, dans le cas où l’assemblée du Bas-Canada continue à refuser de voter les subsides, Londres autorise le gouverneur à puiser dans le Trésor public sans son consentement. Ainsi, Londres répond à la grève parlementaire de l’assemblée canadienne-française par la force, c’est-à-dire par la menace d’une intervention directe, sans tenir compte l’assemblée si nécessaire.

2. Ultime tentative de Gosford et renvoi de la Chambre

Cependant, pour l’instant, le gouvernement de Londres s’abstient de transformer les résolutions Russel en lois qui s'appliqueraient immédiatement. Gosford peut donc convoquer de nouveau le Parlement du Bas-Canada dans une ultime tentative d’amener l’assemblée à céder. La Chambre d’assemblée, peu intimidée, répond : « Si la Grande-Bretagne agit selon l'esprit des résolutions Russell, sa suprématie ne reposera plus sur la force brute. » Gosford renvoie la Chambre et plaide de nouveau la nécessité de suspendre la Constitution du Bas-Canada. La Chambre du Bas-Canada vient de siéger pour la dernière fois sous le régime séparatiste de 1791.

[…]
//p. 274 //

1837, c’est d’abord l’insurrection des Britanniques de Montréal […].
1837, c’est également l’insurrection d’une fraction (seulement) du parti réformiste […].

Gosford, en présence de l’anarchie qui règne dans la région montréalaise, tente de faire arrêter Papineau. On est allé si loin, de part et d’autre, qu’il n’est plus nécessaire de tenir compte des autres combats de 1837. On peut dire que le sort du Bas-Canada, à titre d’État séparé, est définitivement scellé. Le séparatisme, issu de la Constitution de 1791, avait virtuellement vécu.

Nomination de Durham comme gouverneur.

Maurice SÉGUIN, Histoire de deux nationalismes au Canada, Montréal, Guérin, Éditeur, 1997.

jeudi 31 janvier 2008

Le nouvel esprit de la politique coloniale britannique

PRÉSENTATION

La Grande-Bretagne est en pleine révolution industrielle et ce n'est pas une raison pour qu'elle abandonne l’empire, c’est-à-dire ses colonies. Dans son discours au sujet de la crise entre les deux Canadas, Huskisson mentionne la loyauté des sujets britanniques, la nécessité de garder une colonie [par ex.: la Louisiane]. Il envisage l’évolution graduelle des colonies dans la perspective de « Free nations » ; il considère qu'il n'est pas inutile d’envoyer le surplus d’une population pour former une nouvelle nation « anglo-saxonne ». Il croit en la nécessité de guider les colonies. Il voit l’Angleterre et les colonies comme une grande famille. Il est en quelque sorte un impérialiste exalté. Bref, il est un libéral avancé au milieu d’un gouvernement tory.

Au moment où William Huskisson prononce ce discours concernant les affaires canadiennes, le gouvernement tory dont il fait partie perdra le pouvoir aux mains des Whigs. Il dresse quand même un plaidoyer très favorable au maintien de l’empire. Ce discours se situe dans le contexte de la création du comité spécial de la Chambre des communes pour faire rapport sur la question canadienne et la problématique de la crise politique.(@) Ce sera le début de la nouvelle direction de la formation du Second Empire britannique après le traité de Paris en 1783 qui a consacré l’indépendance des États-Unis d’Amérique.

31 janvier 2008

DOCUMENT

DISCOURS D’HUSKISSON SUR L’AFFAIRE DU CANADA (*)
(1828)

Avant de m’asseoir, qu’on me permette seulement d’ajouter un mot ou deux touchant une thèse qu’on a insinuée dans cette Chambre et discutée ailleurs.

Je fais allusion à ce qui s’est dit quant à la politique de se dessaisir entièrement de la colonie. Ceux qui pensent qu’il serait prudent de le faire pourront dire que nous devrions nous éviter la peine et les efforts d’améliorer l’état des provinces en prenant le meilleur et le plus sage parti de s’en défaire totalement.

Que ceux qui raisonnent de la sorte tiennent compte qu’il s’agit de nos compatriotes nés comme nous dans l’allégeance du roi, accomplissant tous les devoirs de sujets, voulant le demeurer et accomplir toutes les obligations que requiert leur allégeance à la Couronne.

Je dis que tant qu’il en sera ainsi ils auront à juste titre le droit de nous réclamer cette protection dont les auront rendus si dignes leur fidélité et leur bonne conduite.

D’un tel sujet, je ne débattrai point – l’importance pour la Grande-Bretagne de ces provinces des points de vue naval, commercial et politique est toutefois très facile à soutenir –, mais avant même qu’ils se hasardent à se permettre une allusion à une conclusion semblable à celle que je viens d’évoquer j’adjure ces honorables messieurs de réfléchir à l’honneur politique de ce pays et à l’impression morale que produirait sur toutes les nations un pareil abandon que rien n’impose et qu’on ne nous aura jamais demandé.

Renoncerons-nous sans défi à une telle colonie ?

Ou bien en ferons-nous – comme on l’a fait d’une autre partie de l’Amérique ayant appartenu elle aussi à la France, je veux dire la Louisiane – une question de livres, de shillings et de pence ?

La vendrons-nous à une autre puissance ? L’Angleterre n’est pas tombée si bas. Nous sommes unis au Canada par les ressouvenirs de courage honorable, tant naval que militaire. C’est un trophée trop glorieux pour s’en dessaisir de l’une ou de l’autre façon que j’ai évoquée. Nous ne pouvons que conserver le Canada par tous les moyens à notre disposition ; si nous ne voulons ternir notre honneur, nous sommes tenus d’accorder jusqu’au bout notre protection au Canada. Cela, par conséquent, n’est pas une opinion qu’en cette matière nous puissions considérer, ne fût-ce qu’un instant.

C’est en outre un pays où, ne l’oublions pas, l’on ne rencontre aucune de ces fâcheuses distinctions sévissant en certaines de nos autres colonies – aucune division en castes, aucun esclavage – le peuple y est presque, si je puis dire, comme une famille unie à ce pays-ci par les liens les plus intimes.

L’Angleterre a enfanté plusieurs colonies, l’une desquelles forme l’un des plus grands et des plus prospères empires au monde ; par elle et par d’autres, nous avons projeté jusqu’aux endroits les plus reculés du globe notre langue, nos libres institutions et notre système juridique. Ce que nous avons planté de la sorte prend maintenant racine et ce qu’aujourd’hui nous nourrissons comme autant de colonies seront sans doute un jour ou l’autre elles-mêmes des nations indépendantes communiquant la liberté aux autres pays.

Si l’on me dit que, pour ce faire, nous avons consenti à de grands sacrifices, je répondrai : ainsi soit-il car, malgré ces sacrifices, l’Angleterre demeure encore, en raison de cette extension, la plus puissante, la plus heureuse des nations qui existent ou n’aient jamais existé. Je dis en outre que nous serions bien rémunérés pour tous les sacrifices à venir, que d’avoir donné naissance à des pays où l’on jouira, encore longtemps j’espère, du même bonheur et de la même prospérité que ceux qui ont marqué ce pays.

Cela sera notre récompense pour avoir établi notre excédent de population non seulement en Amérique, mais en d’autres régions du monde.

Quel plus fort sentiment de fierté pour un Anglais que de sentir que l’Angleterre, envers le monde, a fait son devoir en tentant avec succès de l’améliorer ? Que le Canada demeure à jamais une dépendance de l’Angleterre ou qu’il devienne un État indépendant – non par une séparation hostile, mais, je l’espère, par un arrangement à l'amiable – il reste du devoir et de l’intérêt de ce pays-ci de l’imprégner de sentiments britanniques et de le doter de lois et d’institutions anglaises.

(*) KENNEDY, W. P. M., Statutes, Treaties and Documents of the Canadian Constitution 1713-1929, Oxford University Press, 1930, pages 253-254. ICI : http://www.canadiana.org/ECO/PageView?id=a537d87d5f15b21a&display=9_03428+0281

Notice biographique

HUSKISSON, William (11 mars 1770 - 15 septembre 1830), devient secrétaire particulier de l’ambassadeur britannique en France ; revient en Angleterre en 1792 et se fait élire pour le parti Tory en 1796 ; prononce son premier discours à la Chambre des communes en 1798 ; Pitt le nomme secrétaire au Trésor en 1804 ; publie en mai 1810 un pamphlet intitulé Depreciation of the Currency ; redevient député en 1812 dans un comté du Sussex ; Lord Liverpool le nomme Président du Board of Trade dans son Cabinet en 1822 ; élu membre du Parlement dans Liverpool en 1823 ; accepte de présenter des mesures de réformes des Corn Laws en1826, mais sans succès ; défendra des mesures de libéralisation du commerce ; refuse d’entrer dans le cabinet du Duc de Wellington en 1828 ; maintient sa position en tant que Tory libéral ; est frappé par une locomotive à l’ouverture de la voie ferrée du Northumbrian le 15 septembre 1830.


________________________________________________

(@) « Report of the select committee on the state of the civil government of Canada » (22 juillet 1828).
Référence : KENNEDY, W. P. M., éd., Statutes, Treaties and Documents of the Canadian Constitution, 1713-1929, 2e éd., revue et augmentée, Toronto, Oxford University Press, 1930, pages 254-259. ICI : http://www.canadiana.org/ECO/PageView?id=239307333eaa368a&display=9_03428+0283

« Rapport du comité de la Chambre des communes, 1828. » Dans Arthur G. Doughty et Norah Story, éds, Documents relatifs à l’histoire constitutionnelle du Canada 1819-1828, Ottawa, J. O. Patenaude, 1935, pages 463-474. ICI : http://www.canadiana.org/ECO/PageView?id=23d0e67e833ee5fc&display=9_03426+0475
________________________________________________

mardi 8 janvier 2008

Les hauts et les bas de la politique québécoise de 1867 à nos jours

Un rappel

INDÉPENDANCE DU QUÉBEC 281

L’élection provinciale 2007
S’agira-t-il d’un pouvoir usurpé par de fausses promesses et des engagements bidon ?
Bruno Deshaies
Chronique de Bruno Deshaies dans Vigile.net jeudi 22 mars 2007 (08.01.2008 : 1062 visites)

Source : http://www.vigile.net/L-election-provinciale-2007
(Ouvrir dans une nouvelle fenêtre)

lundi 7 janvier 2008

La mésinterprétation par le Canada-Anglais du 400e anniversaire de la ville de Québec

400e - une affaire canadiAn ?

Pour qui le 400e anniversaire de la ville de Québec ?
C’est plus que la Fête qui va être gâchée, c’est l’avenir même de l’indépendance du Québec qui est bloqué une fois de plus
Bruno Deshaies
Tribune libre de Vigile jeudi 3 janvier 2008 (330 visites + 3 messages (07.01.2008)

Source : http://www.vigile.net/Pour-qui-le-400e-anniversaire-de
Consulter : « Dans ce Dossier » tous les textes réunis par Vigile.net ( http://www.vigile.net/-Quebec-2008-400e-anniversaire- )

Selon le point de vue de l'État canadien et des Canadians, le 400e anniversaire de la ville de Québec constitue le point de départ du Canada-Anglais actuel. Pourtant, la fondation de Québec par Champlain marque surtout l'acte de naissance du premier Canada, c'est-à-dire de la Nouvelle-France. Ceci est bien loin de l'acte de naissance du Canada-Anglais qui débute avec la conquête du Canada par les armées britanniques en 1760. Ce deuxième Canada est un nouveau Canada dans lequel seront annexés les Canadiens de la Nouvelle-France.

Le Canada-Anglais fait de la mésinterprétation historique en prétendant voir sa naissance dans la fondation de Québec en 1760. C'est un leurre comme seuls peuvent se payer les « amis » du fédéralisme canadian et même des nationalistes québécois-français.

La seule façon de réagir à cet événement construit de toutes pièces par le fédéral, c'est de transmettre à la population le sens de l'optique indépendantiste pour faire contrepoids aux défenseurs du fédéralisme. Et qu'on ne vienne pas nous arbitrer ce débat avec des nuances byzantines fondées sur la théorie des antithèses parce qu'une option légitime s'oppose à une autre option qui est positionnée dans une posture de dominant.


dimanche 6 janvier 2008

Le Québec sous haute surveillance

« Les agents d’Ottawa s’infiltrent partout, se mettent les pattes dans tout. » (René Marcel Sauvé)

Rien n’est changé depuis la crise d’octobre
René Marcel Sauvé
Tribune libre dans www.Vigile.net 6 janvier 2008
Source : http://www.vigile.net/Rien-n-est-change-depuis-la-crise

Monsieur Sauvé met en évidence une énième fois la haute surveillance par les services fédéraux canadians des comportements du Québec à tous égards. Savons-nous jusqu’à quel point l’État fédéral peut se donner d’ÉNORMES pouvoirs dissimulés ? Savons-nous jusqu’où peut aller l’Agence de revenu du Canada et même le ministère du Revenu du Québec avec la complicité d’Ottawa pour intimider les contribuables québécois avec des révisions de déclarations d’impôts qui peuvent remonter jusqu’à dix ans et même plus en arrière ? Il serait grandement temps que les médias québécois nous parlent d’autres choses que de la crise du verglas il y a dix ans.

Il est urgent que des recherches soient menées au sujet des programmes d’enquête (qui ressemblent surtout à de l’inquisition) dans le cadre du régime fiscal (qui peut le connaître véritablement ?) canadien ou québécois. La paperasse qui accompagne ces enquêtes est ahurissante. Le contribuable le plus honnête ne peut d’aucune façon parvenir à y voir clair. Les comptables qui rédigent régulièrement des déclarations d’impôts s’y mettent assez souvent le doigt dans l’œil. Il y a toujours un point ou une virgule qui ne convient pas à ces services gouvernementaux. En d’autres termes, il faut faire attention. L’État vous guette !

Conclusion. Il n’y a pas que l’armée qui nous agresse ; il y a tous les autres ministères et en particulier l’Agence de revenu du Canada et le ministère du Revenu du Québec. En fait, ce sont deux forteresses inaccessibles et invincibles pour les particuliers et les petits commerces ou les petites industries ou entreprises. Les inepties que nous pouvons lire dans les documents de ces ministères ne se comptent même plus et les explications qui en sont données sont aussi vaporeuses que les formulaires, les guides ou les écrits qu’on nous adresse. L’armée n’a pas besoin de venir ni la GRC ni la SQ, le fisc s’occupe de nous avec des moyens puissants de dissuasion. L’État a le bras long.