De la guerre d'indépendance au Québec
Le calvaire du Canada
anglais : nous traiter en égaux(Gilles Verrier)
Bruno
Deshaies
2016-02-24
15:00
Cher ami,
Cette chronique fait
référence à tes récentes réflexions sur l’indépendance du Québec. Pour retrouver la version
éditée sur le site de Vigile, il faut donc suivre le chemin infra :
Le titre par
VIGILE :
Le fantasme du Canada raisonnable
La « canadianisation »tranquille de l’indépendanceDéni de la volonté de suprématie anglo-saxonne
Chronique de Gilles Verrier 20 février 2016 945 visites 10 messages
ICI : http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:Q9UpkpBpE7gJ:vigile.quebec/La-canadianisation-tranquille-de -l+&cd=1&hl=fr&ct=clnk&gl=ca
Le texte original de Gilles Verrier :
Le calvaire du Canada anglais : nous traiter en égaux
SITE : Indépendance et mondialisme 19 février 2016
Réflexion sur cette prise de position
On
peut considérer comme un fait
historique le déni collectif de la suprématie canadienne-britannique qui a élargi sa base anglo-saxonne du paysage canadian. Pourtant, Les Québécois-Français
entretiennent historiquement une illusion qui leur fait croire que nous sommes
des égaux au plan collectif. Bien sûr, les Canadiens (français) sont
majoritaires au Québec mais ils sont mineurs au sein de l’ensemble
canadien qui est la nation majeure. Il est clair que c’est «le calvaire du Canada
anglais».
Ta chronique ayant été
retirée du site de Vigile, le onzième commentaire que j’avais préparé n’a pas
été publié.
Commentaire de
Bruno Deshaies
Pour ceux et celles qui
veulent bien comprendre notre incapacité à faire comprendre l’indépendance
politique du Québec, il faudrait qu’ils ou elles réfléchissent à l’importance
du sens des mots. La sémantique n’est pas
une ornementation littéraire. Les mots ont de l’importance et le discours
indépendantiste a des croûtes à manger pour expliquer son objectif politique
fondamental au public d’ici et d’ailleurs.
Se parler entre nous, faire des colloques entre nous, publier des
documents pour nous, voyez qu’il y a une grande différence entre «le fantasme
du Canada» et «le calvaire du Canada anglais».
C’est pourquoi mon commentaire a
eu pour titre celui-ci :
LE CANADA-ANGLAIS EXISTE !
Les deux dernières
chroniques que vous avez écrites abordent des sujets communs. En gros, le Canada-Anglais existe ! Fragile à côté des États-Unis, superpuissance
mondiale, il est en permanence inquiet.
La fin de la Guerre Civile américaine en 1865 a forcé les Canadians à consolider le British
Norh America contre le Republican North America. Il s’agit d’une
constante de l’histoire de la colonie canadienne avant 1760 et des colonies
britanniques après 1760.
Le canadianisme a sa
propre histoire. Dans les années 1950, le
Rapport Massey a mis en évidence cette fragilité du Canada-Anglais (cf. «Le
Rapport Massey et le canadianisme c. l'américanisme»).
http://www.rond-point.qc.ca/rond-point/histoire/le-rapport-massey-et-le-canadianisme-c-lamericanisme-4/ Par voie de conséquences, les
Canadiens-Français et le Québec-province a subi les effets pervers de ce
nationalisme pancanadianiste. Les
tensions ont progressé et Maurice Duplessis a trouvé le moyen de défendre
farouchement notre autonomie provinciale
bien que fédéraliste lui-même. (Cf. «Choisir,
c’est réussir ! Animer le
discours indépendantiste pour atteindre l’objectif de l’indépendance.» (Dans Vigile.quebec,
10-10-2002 .) http://vigile.net/archives/ds-deshaies/docs/02-10-10.html
Je corrobore globalement votre point de vue au sujet des tribulations de
la société québécoise. Vous avez raison d’insister pour que soit tourné toutes
les pierres qui nous voilent la réalité concrète des rapports
Canada-Québec. Mais je me pose une
question :
Doit-on
penser à la place du CANADA ?
«La nation majoritaire
qui n’a pu assimiler la nationalité minoritaire et qui a dû lui consentir des
concessions (comme au moins un État provincial) est dérangée, importunée par cette annexe (cet
appendice).
«La nation
minoritaire est en grande partie désorganisée et subordonnée par la présence de la nation majoritaire, politiquement,
économiquement et culturellement.» (Id., Ibid.)
(Maurice Séguin Les Normes : Chapitre troisième, 1965-1966.)
Sur cette question, j’aimerais laisser à nouveau la parole à Maurice
Séguin où il s’applique à démontrer la nature véritable de cette annexion
politique du Canada-Français (et du Québec-province).
V.– L’ESSENTIEL DE 1867 POUR LE CANADA-FRANÇAIS
9. Survivance et autonomie restreinte
//400// Inutile de dire qu’il
ne faut tenir aucun compte de ces questions plus que secondaires : le status de la langue française, la part
des Canadiens-Français dans la fonction publique du gouvernement central ou
national du Dominion
of Canada, le traitement réservé aux minorités de langues françaises
perdues dans les provinces anglaises //401//
d’un Dominion britannique. La situation politique, le status constitutionnel de la nation
canadienne-française, c'est-à-dire du bloc canadien-français du Québec, nous
intéresse bien davantage.
Peut-on affirmer à propos de la place réciproque du
Canada-Anglais et du Canada-Français dans l'union fédérale l'« equal parternship of the two founding
races » ? Peut-on parler
de l'association à titre de peuples égaux des deux nations
fondatrices ?
Évidemment non.
Ni en 1760, ni en 1840, ni en 1867 et pas plus qu'en 1960 [ni encore
aujourd'hui en 2016], il n'y a eu, répétons-le, ni égalité de droits, ni égalité
de faits entre les deux nationalités. On
sait que l'une possède toute la souveraineté locale et centrale tandis que
l'autre ne détient qu'une autonomie provinciale seulement. Du régime de 1840 et de 1867, ne peut sortir,
pour les Canadiens-Français, l’épanouissement politique, économique et
culturel. En ce sens 1867 n'est pas un
échec. L'union législative à caractère
fédéral de 1841 et l'union fédérale de 1867 recouvrent avec exactitude la
réalité sociale canadienne-française et canadienne-anglaise. Ces deux constitutions sont l'expression,
dans l'ordre constitutionnel, d'un échec colonial de la part de l'Empire
français et d'une réussite coloniale de la part de l'Empire britannique.
Ainsi dans leur propre
patrie, devenue province parce que le Bas-Canada, en 1840 et en 1867, était la
plus importante des colonies britanniques, dans ce Québec où la nationalité
canadienne-française est dominée politiquement et économiquement depuis
1760, dans ce Québec bisethnique, biculturel et bilingue, les Canadiens-Français
subsistent comme un peuple « chambreur » dans l'une des pièces les
plus importantes de la maison qui a été construite et qui est possédée //402// par une autre nation. Le
Canada-Anglais ne peut s'édifier et se développer sans ruiner et sans
provincialiser le Canada-Français.
Le Canada-Français survivra
! Il bénéficiera de l'autonomie
politique restreinte difficile à utiliser à cause de la présence au coeur même
du Québec de la grande bourgeoisie du Dominion of Canada. Cette autonomie restreinte encadrera tant
bien que mal une survivance médiocre, mais qui semble indestructible. Le Canada-Français est comme figé dans
l'inquiétude d'une survivance qui paraît sans issue. Conséquemment, incapable de se libérer et
incapable de disparaître, le Canada-Français est coincé en subissant une
domination étrangère sans être assimilé.
De cette autonomie
provinciale de 1867, l'on peut réaffirmer ce que l'on disait de l'autonomie
obtenue dès 1842, avec LaFontaine, sous l'Union. Cette autonomie politique est absolument
impuissante à conduire les Canadiens-Français à une maîtrise suffisante de la
vie économique de l'État provincial qu'est le Québec. Il reste un État investi par la grande vie
financière, commerciale et industrielle du Dominion of Canada. Il est en effet impensable que la réalité
économique du Québec (ce concept impliquant bien davantage que les seules
sources naturelles), soit majoritairement possédée par les
Canadiens-Français. Et ceci, aussi
longtemps que le Québec demeure une province d'un Dominion transcontinental
britannique.
Réf. : Dans Histoire de deux nationalismes au Canada, Montréal, Guérin
Éditeur, 1997, p. 400-402.
L’interprétation séguiniste de la constitution canadienne tient
principalement au fait qu’elle fait partie intégrante de la Grande histoire de la Nouvelle-France,
du Canada et du Québec (d’hier à aujourd’hui). Un récit révisionniste des
événements ne peut nous éclairer sur notre sort collectif sans une profondeur
temporelle plus large de notre condition historique en tant que collectivité
nationale déchue à l’état de mineure, de province, dans un nouvel empire
britannique qui ne cessera jamais de s’imposer.
(En ce moment, le gouvernement fédéral flirte avec les municipalités, ces
créatures du provincial. L’État fédéral n’a pas de frontières constitutionnelles ! Voyez aussi l’intrusion massive du fédéral
pour le financement des Chaires du Canada sous l’égide d’une bureaucratie de
Comités nationaux fédéraux où il nous est impossible d’en assumer nous-mêmes la
direction et la gestion. Les orientations de la recherche dépendent de la distribution du financement
des professeurs détenteurs d’une Chaire pour 7 ans et renouvelable
automatiquement – une carrière complète avec les services que doivent lui
offrir les universités dans le système canadian.
Nous avons perdu le contrôle sur la recherche universitaire.)
La tradition ne peut nous offrir que le portrait d’une déroute, pas
complètement achevée, et qui exaspère le Canada
britannique. Pour «démaquiller» la source de la naissance du Canada uni tel
qu’il est aujourd’hui, on doit s’attaquer à la constitution du Canada.
Je me demande sincèrement comment «le Parti québécois devra prendre ses
distances avec son passé». Ce n’est
certainement pas en demandant la permission au Canada britannique de «nous traiter
en égaux » pour qu’il ne souffre pas «le calvaire» d’être la nation dominante ?
Notre calvaire
comme nation mineure et minoritaire dotée de pouvoirs restreints consiste à
vivre en permanence un état de nation annexée. Récemment quelqu’un m’a écrit que les
concepts entourant le mot nation ne pouvaient être que du «charabia». Et un
autre, que le concept d’État-nation a peu d’importance même si on ne sait pas
ce que ce terme peut exprimer. «Malbrough s'en va-t’en guerre ne sait
quand il reviendra. …Est mort et enterré.»
Le Parti québécois doit faire une révision déchirante de ses catégories
mentales sur les fondamentaux de l’indépendance politique du Québec. Est-ce qu’on peut dire que le chercheur de
têtes a dans sa mire le candidat qui saura en imposer pour garantir que la
création de l’Institut conduira à un enseignement qui saura se rapprocher du
public et devenir un éveilleur de
conscience nationale au Québec en vue de l’indépendance politique du
Québec ? Pour le moment, tout ce
qui se passe au sujet de cet institut est tout simplement obscur.
Les indépendantistes ne pourront pas se passer facilement d’une
connaissance sérieuse de l’évolution politique, économique et culturelle des
deux Canadas ainsi que de l’histoire américaine. Comme le faisait remarquer Maurice Séguin
dans Les Normes : « La lucidité
sur le passé et le présent peut être source d’évolution planifiée ou de
révolution… tranquille ou non. » (Cf. Introduction.)
Son cours télévisé de 1963-1964 se terminait sur quelques interrogations
fondamentales. Écoutons-le :
CONCLUSION : L'AVENIR, UN QUÉBEC INDÉPENDANT?
«Sera-t-il permis au Québec de transformer ses
relations de dépendance en relations d'égalité dans l'indépendance? Ou sera-t-il possible au Québec de corriger
deux siècles d'histoire? L'Amérique
anglaise lui a dit non en 1760 par la Conquête.
Le Canada-Anglais lui a dit non en 1840 par l'union législative et en
1867 par l'union fédérale. Quelle
réponse réserve le vingt-et-unième siècle?»
Réf. : Dans Histoire de deux nationalismes au Canada, Montréal, Guérin
Éditeur, 1997, p. 431.
Postscriptum
Consulter le texte de Davide Gentile : http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2016/02/23/005-institut-souverainete-recherche-autodetermination-independance-peladeau-pq.shtml?isAutoPlay=1
POLITIQUE. - VIDEO - L'Institut de recherche sur l'autodétermination des peuples et les indépendances nationales fait son apparition dans le paysage politique québécois. Il sera présidé par le professeur Daniel Turp.
L'IRAI est maintenant dans l'internet et le Président donne déjà des entrevues aux médias. Les Lettres patentes de l'Institut nous seront connues prochainement. Malgré tout, le Chef de l'Opposition officielle à l’Assemblée nationale va avoir besoin d'un QG personnel à lui. Et le DGE n'aura rien à savoir qu'il reçoit des conseils de personnes averties sur la VIE politique au Québec (qu'il les paie ou non!). Les décideurs ont besoin d'un «inner circle» pour les aiguillonner (comme, p. ex. : the president's inner circle of advisers ou le cercle restreint des conseillers du président). Un Chef de l'Opposition officielle n'y aurait pas droit ?
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